Union Africaine: ces réformes qui marquent l'échec d'Alger et la fin de son influence sur l'organisation

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Le 21/11/2018 à 14h05, mis à jour le 21/11/2018 à 14h07

Alger voulait que le système opaque d'élection des membres de la Commission de l'Union africaine soit maintenu, mais la réforme consacre plus de transparence. Ahmed Ouyahia a également échoué à faire en sorte que la Conférence des chefs d'Etat garde la mainmise sur l'exécutif.

Alors que l'Algérie a toujours voulu s'imposer comme l'une des nations qui dictent leur volonté à l'Union africaine, son poids politico-diplomatique au sein de l'organisation continentale est en train de se réduire comme une peau de chagrin.

A Addis-Abeba, lors du 11e sommet extraordinaire de l'organisation continentale les 17 et 18 novembre derniers, par la voix d'Ahmed Ouyahia, son Premier ministre, Alger s'est clairement opposée à toute réforme institutionnelle qui renforcerait les pouvoir de la Commission de l'Union africaine. 

«L’Union africaine doit, naturellement, demeurer sous le contrôle souverain des Etats membres et ses mécanismes ont la charge de mettre en œuvre les décisions et les politiques arrêtées par les instances délibérantes», avait-il dit dans son discours, croyant que les Etats membres allaient se plier à son bon vouloir.

Malheureusement, l'écrasante majorité des Etats membres a estimé qu'il fallait une réforme en profondeur, en donnant notamment plus de pouvoir au président de la Commission, qui est l'organe exécutif de l'Union africaine. 

Si Ouyahia voulait que les Etats membres continuent à être les seuls qui décident de nommer ou de mettre fin au mandat des Commissaires, la réforme adoptée en a décidé autrement.

En effet, désormais, c'est le président de la Commission qui est le véritable "patron", à même de prendre des décisions stratégiques qui s'imposent même à la Conférence des chefs d'Etat, contrairement à ce que souhaitait le Premier ministre algérien, fervent défenseur d'un immobilisme d'un autre âge.

Ainsi, le président de la commission pourra mettre fin au mandat des Commissaires dont le nombre a été ramené à 6 (contre 8 jusqu'ici). La réforme consacre la réinstauration d'une hiérarchie claire au sein de l'exécutif de l'Union africaine.

La Commission et ses 10 membres ont ainsi la force et la légitimité, dont Alger ne voulait pas qu'ils se parent, pour mettre en œuvre les décisions de l'Union africaine, sans avoir à s'en référer tout le temps aux chefs d'Etat. 

De plus, il ne s'agira pas seulement d'avoir de l'influence ou user de moyens occultes pour prétendre être élu à la tête d'une commission...

On se souvient que l'année dernière, lorsque la Nigériane Fatima Kiyari Mohammed a voulu prendre la place de l'Algérien Smaïl Chergui, candidat à sa propre succession au poste de Commissaire de la Paix et de la Sécurité, l'élection avait été entachée de beaucoup d'irrégularités, avec notamment un nombre de voix exprimées supérieur au nombre de votants. 

Cette situation avait été dénoncée par la presse nigériane. Finalement, Smaïl Chergui avait été réélu dans des circonstances douteuses et controversées. 

Cela ne pourra plus arriver avec la réforme à laquelle l'Algérie s'est opposée vainement. En effet, les 6 Commissaires ne seront plus uniquement choisis par un vote séance tenante à la Conférence des chefs d'Etat.

Car après la proposition des candidats par les régions du continent, les candidats doivent réellement convaincre. Ils sont tenus de publier leur CV sur le site de l'Union africaine.

De plus, des débats entre candidats à un même poste sont organisés et diffusés dans les télévisions publiques pour que l'opinion publique africaine sache qui veut être à son service. Enfin, face aux chefs d'Etat et de gouvernements, il y aura un grand oral, et non plus des discussions couloirs, des pressions et la diplomatie du chèque, si chère à l'Algérie. 

En somme, avec de telles réformes, les jours de Smaïl Chergui sont comptés à la tête de la Commission de la Paix et de la Sécurité, à laquelle son pays se cramponne depuis la réforme de l'Union africaine.

Mais il y a plus important: le fait que l'Algérie n'ait pas réussi à imposer sa volonté aux chefs d'Etat du continent, montre aussi et surtout que son influence s'est estompée auprès des Etats de plus en plus soucieux de l'intérêt du continent. L'entité sponsorisée par Alger, "la RASD", va certainement pâtir de la perte d'influence de son protecteur à l'UA.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 21/11/2018 à 14h05, mis à jour le 21/11/2018 à 14h07