C'est un sacré coup au derrière que viennent de recevoir les diplomates algériens, avec cet évènement inédit dans l'histoire des relations entre deux pays africains. Ce qui s'est passé à Bamako dans la nuit du mardi au mercredi rappelle les évènements de Téhéran en 1979, lorsque la foule en furie avait pris d'assaut l'ambassade américaine.
Vitres en éclats, caméras arrachées
Les migrants maliens exaspérés par les conditions d'expulsion auxquelles les soumettent les autorités algériennes, ont purement et simplement décidé de marcher sur l'ambassade d'Algérie, en représailles. Le caractère spontané de la marche a pris de surprise les forces de l'ordre qui n'ont pas pu empêcher que les locaux de l'Ambassade aient été caillassés.
Les migrants, munis de cailloux et d'autres projectiles, n'ont pas fait dans le détail. Ils voulaient visiblement infliger à la représentation diplomatique le même calvaire qu'ils ont vécu chez leur voisin du nord du Mali et lors de leur expulsion. Les bâtiments de l'ambassade portent les traces de leur passage. Sur place, on peut constater de nombreux dégâts, notamment les caméras de surveillance arrachés, les lampadaires cassés, les barreaux en fer tordus et les vitres parties en éclats.
Jetés dans le désert, attaqués par des bandits
La raison de cette furie est l'expulsion des centaines de migrants à la frontière malienne. Jusqu'ici, les Maliens, Nigériens, Guinéens, Ivoiriens voire Camerounais étaient jetés vers la frontière avec le Niger et non celle avec le Mali. Mais, il y a deux semaines, le ministre de l'intérieur nigérien a été catégorique en exigeant que cesse cette pratique. Du coup, c'est vers le Mali que se tournent désormais les autorités algériennes, sauf que les premières expulsions vont très mal se passer.
Les migrants maliens affirment qu'ils ont été jetés en pâture à des bandits armés qui les attendaient en cours de route. Or, qui connaît le nord malien sait que les hommes armés ne sont pas des enfants de chœur. De plus, les liaisons qui existent entre les trafiquants d'êtres humains et les forces algériennes les font penser que le fait qu'ils tombent nez à nez avec les bandits de la région ne relève pas du hasard.
Ni amabilités feintes ni hypocrites sourires de migrants
Toujours est-il que, cette fois, ce sont 120 migrants qui ont été jetés à Bordj Badji Mokhtar, en territoire algérien. Ils devaient alors marcher jusqu'à Aïn Khalil, situé au Mali, après deux jours de marche, car les deux localités sont relativement distantes, l'une de l'autre.
Selon la presse Algérienne, le ministre des Affaires étrangères vient de convoquer, ce jeudi 15 mars, l'ambassadeur du Mali à Alger pour qu'il s'explique sur ces évènements. Quel que soit l'issue de cette convocation, la diplomatie algérienne est obligée de se rendre à l'évidence que son pays ne peut pas continuer à traiter les migrants africains avec mépris et espérer avoir en réponse de la part des populations africaines, d'hypocrites sourires. Les amabilités feintes des diplomates de certains pays suffisent.