Qui sont les commanditaires de l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, les deux journalistes de Radio France Internationale (RFI) assassinés à Kidal, au nord du Mali en 2013?
Les deux envoyés spéciaux français de RFI, en reportage dans le nord du Mali ont été enlevés le samedi 2 novembre 2013 par des hommes armés devant le domicile d’Ambéry Ag Rhissa, un représentant du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), avant d’être retrouvés criblés de balles à l’extérieur de Kidal.
Depuis cinq ans, ce double assassinat n’est pas totalement élucidé et les résultats de l'enquête se caractérisent par plusieurs zones d’ombres.
Toutefois, depuis quelques jours, de nouveaux éléments ont été apportés à ce dossier. Ainsi, selon Mondafrique, «le dossier judiciaire des deux journalistes de RFI assassinés au Mali, Ghizlaine Dupont et Claude Verlon, a commencé livrer quelques pistes troublantes qui mèneraient, pour certaines, vers les services algériens du célèbre général Toufik».
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Le site d’information cite un journaliste de l'hebdomadaire français L’Express, Laurent Léger, qui a mené une enquête et a pu consulter des documents signés par des juges français en décembre 2017. Ces document donnent l’identité des quatre membre du commando ayant enlevé et exécuté les deux journalistes, ainsi que le nom des deux probables commanditaires de ce crime.
Selon cette enquête, «le premier commanditaire serait Abdelkrim le Touareg, un émir lié à Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), ”neutralisé” depuis par la DGSE. Le second serait le patron d’Ansar Dine, Iyag ag-Ghali, supérieur d’Abdelkrim le Touareg».
Quant aux quatre membres du commando, l’un d'entre eux est connu sous le nom de Baye ag-Bakabo, et avait des relations avec le Premier ministre du Mali, Soumeylou Boubèye Maïga, à l'époque ministre de la Défense, qui aurait été trahi par des enregistrements émanant des services américains. L’homme est par ailleurs considéré comme un proche d’Alger.
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Quant à Iyad ag-Ghali, ses relations avec les services algériens, particulièrement à l’époque du général Mediène dit «Toufik», tout puissant chef de l’ex DRS (Services algériens) entre 1990 et 2015, ne fait pas l’ombre d'un doute.
D’ailleurs, l’homme continue à voguer entre le nord du Mali et le sud algérien sans être auunement inquiété, avant tout grâce à la protection dont il bénéficie de la part d’Alger.
«C’est un geste de courtoisie diplomatique et militaire dont on se souviendra longtemps au ministère de la Défense.
En 2014, alors qu’elle avait Iyad ag-Ghali, chef du mouvement djihadiste malien Ansar Eddine à portée de fusil, la France a choisi de prendre l’avis d’Alger avant d’agir, plutôt que de le ”neutraliser” ou de le capturer vivant», a ainsi écrit le journaliste Seidik Abba dans le site électronique Le Monde Afrique.
A cette demande française, le journaliste explique que les Algériens ont alors sèchement répondu: «ne vois occupez pas d’Iyad. Nous en faisons notre affaire».
Ainsi, si aujourd’hui les juges français arrivent à identifier Iyad ag-Ghali comme étant le principal commanditaire de l’enlèvement et de l’assassinat des deux journalistes français, il est légitime de se demander quel a été le rôle joué par l’ancien membre des services secrets algériens dans cette affaire.
Outre le fait que c’est là un secret de polichinelle qu’Iyad ag-Ghali a toujours trouvé refuge en Algérie, grâce à la bienveillance des services secrets algériens, il faut aussi souligner que l’Algérie et surtout le patron de la DRS (Direction des renseignemenst et de la Sécurité) à cette époque voyaient d’un très mauvais œil l’intervention de la France au Mali, alors que leur protégé prenait le dessus sur l’armée malienne et fonçait directement vers Bamako.
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Ainsi, l’hypothèse de l’assassinat des deux journalistes, est vue par certains comme "un message clair des services algériens à Paris sur la présence peu souhaitée des Français au nord du Mali…", souligne Mondafrique.
Une chose est sûre, si les noms des commanditaires et exécutants sont désormais connus, ou presque, l’enquête piétine, très bizarrement, cinq longues années après les faits.
Et avec la mort de trois des six coupables, on risque bien, aujourd'hui, de ne jamais mettre la main sur le véritable commanditaire, Iyad ag-Ghali, et sur les survivants des exécutants qui se trouveraient actuellement, selon les proches des journalistes assassinés, en Algérie...