Algérie: la diplomatie du baril de pétrole au lieu d'investissements en Afrique

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Le 23/10/2016 à 13h13, mis à jour le 23/10/2016 à 17h34

A ce jour, aucun groupe algérien ne s'est développé sur le continent. L’Algérie nourrit pourtant des ambitions de puissance régionale, voire continentale. Jusqu'ici, le producteur de pétrole et de gaz a privilégie l'envoi de quelques barils çà et là. Son retard est malheureusement irrattrapable.

Officiellement, l’Algérie veut bien aller en Afrique, mais visiblement elle ne sait pas quel chemin adopter, ni comment s’y prendre. Absente depuis toujours du continent, sur le plan économique, elle doit apprendre et adopter des réflexes hérités d'un socialisme imporductif. Ses seules relations avec le reste de l’Afrique se limitent à quelques échanges commerciaux. Elle dispose de ses hydrocarbures qu’elle n’a aucun mal à vendre à d’autres partenaires et considère que tout partenariat doit dépendre du pétrole et du gaz et seulement de ces deux ressources. Par conséquent, elle a toujours considéré qu’elle fait une faveur à ses partenaires africains

La diplomatie du baril de pétrole

En 2015, les échanges se sont limités à quelques pays africains et ne dépassent pas 200 millions de dollars, essentiellement constitués d’hydrocarbures. Elle n’achète pratiquement rien des pays africains.

Côté investissements, il faut dire que les rares entreprises qui ont osé aller en Afrique se comptent sur les doigts d’une seule main. De plus, pour les rares entreprises qui veulent se lancer, la démarche vers l’Afrique est timorée.

Par exemple, Le groupe Condor Electronics a choisi le Soudan, mais dans un premier temps il ne s’agissait que d’un contrat de distribution avec Giad, groupe industriel soudanais dans le montage automobile et l’immobilier. L’objectif était d’y exporter des produits électroménagers dans des quantités tellement faibles que le projet était voué à l’échec dès son lancement. "Nous allons exporter par des volumes de 200.000 à 300.000 euros", disait Abderrahmane Benhamida, PDG de Condor Electronics au moment de la signature du partenariat avec les Soudanais en 2014. Evidemment, cela n’a rien donné de concret, deux ans après son amorçage, les investissements qui devaient suivre attendent encore. Le groupe Condor ne parle même plus du Soudan et ses ambitions vers l'Afrique centrale ont été abandonées. 

Cevital préfère le Sri Lanka

Est-ce parce que l’Algérie manque cruellement d’entreprises capables d’aller à l’assaut du continent comme c’est le cas de son voisin marocain, ou encore du Nigéria ou de l’Afrique du Sud ? Même si beaucoup se posent la question, la réponse est pourtant négative. Il existe bien des groupes qui seraient en mesure d’aller dans les pays africains. Ni les moyens financiers, ni l’expertise ne leur manquent.

Pas plus tard qu’en début de semaine, le milliardaire Issad Rebrab qui, selon Forbes, est la première fortune du Maghreb avec 3,5 milliards de dollars, a annoncé un surprenant engagement au Sri-Lanka. Il compte construire une raffinerie d’huile et une autre unité de production de sucre.

La réalité est qu’il n’y a jamais eu de volonté politique de la part des dirigeants algériens de se rapprocher du continent autrement que par la diplomatie du portefeuille, notamment pour acheter ça et là quelques soutiens à propos du problème du Sahara marocain. Une cargaison de pétrole expédiée a toujours fait l’affaire.

D’ailleurs, jusqu’en 2014, seule la Sonatrach était autorisée à investir à l’étranger. La loi permettant aux entreprises de transférer des dinars pour investir hors d’Algérie n’a pas donné le résultat qu’en attendait le gouvernement.

Un retard irrattrapable

En effet, les rares groupes qui s’intéressent au reste du monde se tournent plutôt vers l’Europe et l’Asie. Issad Rebrab a racheté notamment le groupe électroménager français Brandt, l’espagnol Alas Iberia, spécialisé dans l’extrusion d’Aluminium et le sidérurgiste italien Luchini. Toutes ces acquisitions ont été réalisée dans la foulée de l’adoption de la loi de 2014.

L’Algérie a un sérieux retard à rattraper en matière de diplomatie économique. Cette absence, lui vaut aujourd’hui de perdre du terrain sur le continent au moment où l’Afrique économique se construit. On ne compte plus les pays africains qui enregistrent une croissance supérieure à 6%, notamment la Côte d’Ivoire, le Sénégal, l’Ethiopie, le Rwanda, l’Ouganda, la Tanzanie, le Kenya. L’Algérie n’y a contribué d’aucune manière et malheureusement, elle verra les fruits de cette performance lui échapper.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 23/10/2016 à 13h13, mis à jour le 23/10/2016 à 17h34