Ahmed Ouyahia et son gouvernement ont intérêt à faire fonctionner la planche à billets pour espérer terminer la grande mosquée d'Alger. Car le monument qu'Abdelaziz Bouteflika souhaite léguer à la postérité est un vrai gouffre financier. On y va de petites rallonges en gros avenants et ce qui est encore un immense amas de béton à la périphérie d'Alger peine à entrer dans la délicate phase de parachèvement.
Le gouvernement d'Ouyahia a alloué au chantier une enveloppe de 30 milliards de dinars, soit 200 millions d'euros supplémentaires. "Et cette première tranche en appellera assurément d’autres, en raison de la quantité de travaux qui restent à réaliser", prévient un site internet algérien proche des généraux. Du côté des responsables du projet, on affirme que c'est la dépréciation de la monnaie algérienne, le dinar, face à l'euro et au dollar, qui justifie que cette rondelette somme soit mise à leur disposition.
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Mais, en réalité, tout ceci prête à sourire, tant il y a d'approximations dans la manière dont ce projet est géré. À titre d'exemple, 3,7 milliards de dinars, l'équivalent de 25 millions d'euros, soit quelque 12,33% du supplément, seront réservés "à l’élaboration d’une nouvelle étude d’évaluation de l’état d’avancement de ce projet de la démesure", commente avec ironie le même site d'information.
Comment peut-on prétendre avoir atteint la phase finale d'un projet, lancé en 2012, mais dépenser une fortune pour évaluer "son état d'avancement"? D'autant que les autorités algériennes ont reconnu que les finances publiques sont au bord du gouffre, d'où la loi votée pour actionner la planche à billets.
Il convient de rappeler qu'initialement, en 2012, l'édifice ne devait coûter qu'un milliard de dollars. Mais c'était à une époque où les caisses de l'État algérien étaient pleines. Cinq ans plus tard, le Trésor public algérien a déjà déboursé le double du montant prévu, alors qu'on n'est pas encore sortis du gros oeuvre. Or, selon les architectes, pour un édifice similaire, le coût de la finition peut varier entre 30% et 50% de la valeur globale du projet. Il faudra que le Trésor public algérien soit prêt à délier les cordons de la bourse pour en sortir entre 1,7 et 2 milliards d'euros. Malheureusement, la planche à dinars ne suffira pas, la quasi-totalité des matériaux et du savoir-faire venant de l'étranger, il faut beaucoup de devises que l'Algérie n'a plus.