Covid-19: après le Maroc et la Tunisie, l’Algérie se résout finalement à adopter le pass vaccinal

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Le 10/12/2021 à 13h12, mis à jour le 10/12/2021 à 13h17

L’Algérie avait refusé d’adopter le pass vaccinal arguant du «respect des libertés individuelles». Toutefois, face à la crainte d'une 4e vague, aux contaminations dans les établissements scolaires, à l’apparition d'Omicron et au faible taux de vaccination, les autorités ont décidé de changer de cap.

En octobre dernier, le Maroc, pays ayant le plus vacciné sa population contre le Covid-19 au niveau du continent africain, avec les Seychelles, a annoncé la mise en place du pass vaccinal pour obliger les Marocains encore réticents à se faire vacciner, suivi quelques jours plus tard par la Tunisie. Les autorités algériennes, par manque d’anticipation, comme ce fut le cas depuis l’apparition de la pandémie du Covid-19, comme en attestent leurs difficultés à s’approvisionner en vaccins, avaient décidé de ne pas suivre en justifiant leur décision par leur «respect des libertés individuelles! Une autre manière de tancer le voisin de l’ouest en le qualifiant de manque de respect des libertés individuelles en obligeant la population à se faire vacciner pour accéder à certains lieux publics. Mais le temps a donné raison au Maroc.

En effet, les autorités algériennes, qui font face à une nouvelle hausse des cas de contagions au Covid-19 et un faible taux de vaccination sont inquiètes et ont décidé de changer de stratégie en adoptant le pass vaccinal.

La décision a été prise par le Premier ministre Aïmene Benabderrahmane qui a décidé de la généralisation progressive du pass vaccinal, après son instauration pour accéder aux stades, aux sales de fêtes ainsi qu’aux voyages par bateaux.

Désormais, celle-ci sera étendue à d’autres espaces, lieux et édifices affectés à usage collectif ou accueillant du public où se déroulent des cérémonies. De même, pour les voyageurs, le pass vaccinal est obligatoire pour entrer et sortir du territoire algérien.

A travers cette mesure, tout en évitant de parler d’obligation vaccinale, les autorités algériennes qui avaient menacé de rendre la vaccination obligatoire essayent de pousser les citoyens à adopter ce moyen d’immunisation.

Ce changement de cap des autorités algériennes s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, il y a la hausse des cas de Covid-19 dans le pays et ce, malgré des données très sous-estimées. En effet, alors qu’on était descendu sous la barre des 100 cas quotidiens, depuis quelques jours, les contagions sont en hausse et dépassent les guérisons. Ainsi, lors des journées du 8 et 9 décembre, le pays a enregistré respectivement 188 et 177 cas quotidiens.

Ce rebond des contaminations inquiète les autorités au moment où l’on s’attend au Maghreb à la 4e vague de contagion dans le sillage de l’Europe qui traverse actuellement la 5e vague de Covid-19. Et, à ce titre, tous les professionnels sanitaires algériens sont unanimes pour souligner que les chiffres avancés par les autorités sont très loin de refléter la réalité des contaminations au Covid-19. Ils se basent sur les données des services de prise en charge des soins critiques des personnes atteintes du Covid-19 au niveau des structures de santé qui sont en hausse.

D’ailleurs, les contaminations au niveau des établissements scolaires algériens reflètent clairement qu’il y a une nouvelle hausse des contagions que ne reflètent pas les chiffres communiqués quotidiennement. Ainsi, rien qu’à Tizi-Ouzou, 55 établissements scolaires sont touchés par la pandémie du Covid-19 et plus de 100 personnes ont été contaminées dont majoritairement des élèves. Un dépistage complet allait certainement montrer l’ampleur des contagions au niveau des milieux scolaires.

C’est face à cette situation que les autorités ont décidé de chambouler le calendrier des vacances de fin d’année en les avançant et prolongeant d’une semaine et ce, dans le but de casser la chaîne des contaminations au niveau scolaire et en profiter pour vacciner les enseignants et le personnel administratif des écoles, collèges et lycées du pays.

Enfin, cette décision se justifie aussi par le faible taux de vaccination contre le Covid-19 en Algérie. En effet, d'après les données disponibles distillées par les autorités sanitaires, l’Algérie compte 5 millions de personnes totalement vaccinées, sur une population totale de 45 millions d’habitants. En clair, seulement 11% de la population du pays est totalement vacciné.

Autrement dit, on est ainsi loin d’avoir immuniser la population cible estimée actuellement à 36 millions de personnes pour laquelle il faudrait 72 millions de doses de vaccins anti-Covid-19. Actuellement, 5 millions d’Algériens ont été totalement vaccinés et 6 autres millions de personnes ont reçu 1 dose de vaccin. Et parmi ces 6 millions, de nombreuses personnes n’ont pas voulu prendre la seconde dose. Du coup, certains d’entre eux ne sont plus immunisés. C’est dire que la population immunisée du pays est plus que négligeable.

A titre de comparaison, au Maroc, ce sont 22,7 millions de personnes qui ont été complétement vaccinées sur une population totale de 37 millions d’habitants, soit un taux de vaccination de 61,35% de la population totalement immunisées. Idem pour la Tunisie qui compte 5,29 millions de personnes totalement vaccinées sur une population de 12 millions d’habitants, soit un taux de vaccination de 44,08%. La Mauritanie, avec 684.000 personnes totalement vaccinées, sur une population de 4,5 millions d’habitants affiche un taux de vaccination de plus de 15%.

Bref, l’Algérie affiche un retard considérable en matière de vaccination. C’est ce qui pousse les autorités à adopter le pass vaccinal. Toutefois, le mal semble être fait au départ avec une campagne chaotique et une abscence de communication digne à même de rassurer les citoyens. Du coup, en dépit de toutes les mesures et l’approvisionnement du pays en vaccins, les citoyens rechignent à se faire vacciner et 13 millions de doses sont stockés faute de preneurs.

Par Karim Zeidane
Le 10/12/2021 à 13h12, mis à jour le 10/12/2021 à 13h17