Forum Allemagne-Afrique: un nouvel afro-réalisme germanique

La Chancelière allemande, Angela Merkel, et le président malien Ibrahim Boubacar keita, à l'aéroport de Bamako.

La Chancelière allemande, Angela Merkel, et le président malien Ibrahim Boubacar keita, à l'aéroport de Bamako. . DR

Le 24/01/2017 à 18h06

La première puissance économique européenne rencontre le continent qui a enregistré la plus forte croissance de la décennie précédente. Le forum de mars prochain promet de donner une nouvelle dimension aux relations d'affaires entre l'Afrique et l'Allemagne.

Jusqu'ici, les investissements du pays d'Angela Merkel ainsi que les échanges avec l'Afrique sont à la traîne, au vu de la taille de l'économie allemande. Mais visiblement, la première puissance européenne veut qu'il y ait un vrai changement. Elle prévoit d’organiser le 23 mars 2017 un forum économique Afrique-Allemagne à Francfort. Une manière de pousser les entreprises allemandes à mieux s’intéresser à l’Afrique et par la même occasion redynamiser ses liens commerciaux avec les pays africains.

En réalité, la démarche allemande n'a rien de philanthropique. Car l'Allemagne veut régler le problème migratoire en attaquant le mal par la racine. Car, si l'Afrique est en croissance, il n'en demeure pas moins que c'est le continent où la pauvreté est la plus criarde. Seul le développement sera à même d'endiguer le problème de l'immigration. Mais cela passera par l'investissement des entreprises allemandes, notamment pour la création de richesse sur le continent. 

Pour l’heure, seuls trois pays africains que sont l’Afrique du Sud, le Nigéria et l’Algérie monopolisent les 90% des 10 milliards de dollars investis chaque année par l’Allemagne dans le continent. C’est investissements restent timides. En effet, les entreprises allemandes ne réalisent que 2% de leurs activités en Afrique. D’un montant global de 60 milliards de dollars en 2013, les échanges commerciaux germano-africains sont bien inférieurs à ceux entre la Chine avec l’Afrique, estimés à quelque 200 milliards de dollars, durant la même année.

Le Forum Allemagne-Afrique est ainsi initié pour combler ce retard par le renforcement de la coopération entre les deux parties. "Le besoin de l’Allemagne de toucher de nouveaux marchés coïncide avec les indicateurs économiques de plus en plus sains de nombreux pays africains, notamment la croissance de la classe moyenne, une meilleurs stabilité politique et le développement de l'industrie au niveau national", a précisé Charles Huber, député et membre du Comité de coopération économique et de développement de la République d’Allemagne». il soutient par ailleurs que «l’Afrique apprécie particulièrement l’éthique du travail, la précision et la fiabilité allemande».

De tous les continents, l’Afrique est celui dans lequel on enregistre les meilleures croissances. Une tendance qui devrait aller crescendo jusqu’en 2040, selon les prévisions. A la tête du G20 pour une année, l’Allemagne entend jouer sa partition dans le continent en général. «Nous devons encourager l’investissement privé et dans les infrastructures en Afrique», a pour sa part déclaré Wolfgang Schaüble, le 6 décembre dernier, à l’occasion du forum Business 20. «L’objectif est d’augmenter la croissance et l’emploi, de promouvoir l’inclusion et de donner aux Africains des perspectives économiques sur place, de façon à ce qu’ils n’aient pas à quitter leur pays d’origine pour chercher des moyens de subsistance ailleurs», a soutenu, le ministre allemand des Affaires étrangères.

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Cet intérêt pour le continent est très nouveau et n'a débuté qu'avec Angela Merkel, sans doute pour assayer de combler le gap qui sépare l'Allemagne des autres puissances. La récente tournée de la chancelière allemande en est une illustration. Elle est la première chef de gouvernement allemand à se rendre à la fois en Ethiopie, au Mali et au Niger. En tant que présidente du G20, elle a également décrété que 2017 serait une année où l'Afrique serait la prorité des 20 pays les plus industrialisés. 

Beaucoup de pays africains veulent sauter sur l'opportunité d'attirer les investissements germaniques. Car, pour l'heure l'engagement des hommes d'affaires allemands sur le continent reste très faible, de même que la coopération. 

A titre d'exemple, le Sénégal, qui a toujours entretenu de bonnes relations politiques et diplomatiques avec l’Allemagne. ne compte pratiquement pas d'entreprises allemandes. Dans le domaine de la coopération, depuis 1960, seuls 685 millions d’euros ont été financés par l’Allemagne dans l’assistance technique et financière au Sénégal. Une somme marginale au vu de la puissance allemande et des capacités d’investissement de ses entreprises.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 24/01/2017 à 18h06