Lors d'un des très rares entretiens qu'elle a accordé à la presse, elle affirmait en 2013 qu'elle ne faisait "pas de la politique" mais uniquement "des affaires".
Sauf que ses affaires, florissantes sous le règne de son père, sont plus compliquées depuis l'arrivée au pouvoir en août d'un nouveau chef de l'Etat, Joao Lourenço. Mercredi, ce dernier a annoncé lui avoir retiré son poste de PDG de la compagnie pétrolière Sonangol, fleuron de l'économie nationale.
Cette mère de famille de 44 ans encaisse un premier revers, mais n'en est pas à sa première contradiction. Fille d'un guérillero marxiste, elle incarne aujourd'hui la femme capitaliste africaine.
En 2013, le magazine américain Forbes l'a nommée "première femme milliardaire d'Afrique". Un statut qui a propulsé sur le devant de la scène cette élégante métisse extrêmement discrète.
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Son patrimoine est alors estimé à 3,3 milliards de dollars dans un pays où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale.
Isabel dos Santos dirige un immense empire financier, dont une importante partie est placée au Portugal, l'ancienne puissance coloniale de l'Angola, selon Forbes.
Son portefeuille inclut des participations dans les télécommunications (Unitel, premier opérateur d'Angola, et le géant Nos au Portugal) et les banques (BIC en Angola et PBI au Portugal).
Pour l'opposition angolaise, elle personnifie un système corrompu qui concentre pouvoir et richesse.
Isabel dos Santos se défend pourtant bec et ongles de s'être enrichie grâce à la position de son père, qui a dirigé de 1979 à cet été l'Angola, premier pays producteur d'or noir du continent africain avec le Nigeria.
"J'ai le sens des affaires depuis que je suis très jeune. Je vendais des oeufs de poule quand j'avais 6 ans", a-t-elle raconté. De l'argent qu'elle utilisait pour acheter de la barbe... à papa.
"Je ne suis financée par aucun argent ou fonds public", a-t-elle assuré au Wall Street Journal début 2016. "J'ai toujours voulu me débrouiller seule, sans être dans l'ombre de mes parents".
- Piston de papa ? -
Ses déclarations ont parfois du mal à convaincre.
En Angola, il est "impossible d'avoir une carrière de +businessman+ ou de +businesswoman+ à succès sans avoir des accointances avec le régime", souligne Didier Péclard, spécialiste de l'Angola à l'université de Genève.
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"L'attribution des grands marchés, et surtout de marchés aussi sensibles que la téléphonie mobile, ne peut se faire sans qu'on ait des soutiens au sein du régime", ajoute-t-il.
Dans un télégramme confidentiel du 7 décembre 2009 dévoilé par WikiLeaks, l'ambassade des Etats-Unis à Luanda assurait qu'Isabel dos Santos devait son succès dans les affaires "en grande partie au soutien de son père".
Sa nomination en juin 2016 à la tête de la Sonangol n'a rien fait pour dissiper les rumeurs persistantes de "piston". Un collectif d'avocats a crié au népotisme et lancé une procédure judiciaire pour contester sa nomination, rapidement rejetée.
Près d'un an et demi plus tard, le président Lourenço, soucieux d'assoir son autorité sur le pays et de s'émanciper du camp dos Santos, leur a implicitement donné raison en la limogeant.
Isabel est née à 1973 à Bakou, en Azerbaïdjan soviétique, où sa mère russe et son père suivaient des études d'ingénieur. A cette époque, l'Azerbaïdjan sert d'avant-poste russe pour accueillir les jeunes cadres des mouvements de libération africain.
De sa mère, une championne d'échecs russe, Isabel a sans doute hérité le côté stratège.
Au divorce de ses parents, elle emménage avec sa mère à Londres, où elle étudie l'ingénierie mécanique et électrique au prestigieux King's College.
Elle revient en Angola dans les années 1990, avant d'ouvrir un modeste restaurant, le Miami Beach. Elle prend véritablement son envol en 1999, quand elle met la main sur le premier opérateur de téléphonie mobile de son pays, Unitel.
Polyglotte, elle partage aujourd'hui son temps entre Londres, Lisbonne et Luanda.
Isabel dos Santos s'est mariée en 2002 à l'homme d'affaires congolais (RDC) et collectionneur d'art Sindika Dokolo. Leurs noces dans les jardins du Palais rose, siège de la présidence à Luanda, sont dénoncées par l'opposition. Selon le Guardian, elles auraient coûté 4 millions de dollars.