Afrique du Sud. Crise: 10 milliards de dollars seront grignotés sur les salaires du public

DR

Le 27/02/2020 à 12h15, mis à jour le 27/02/2020 à 12h19

​Le ministre sud-africain des Finances Tito Mboweni a dévoiée mercredi après-midi devant le Parlement du Cap (sud-ouest) un projet de budget annuel aux allures de quadrature du cercle dans une économie au bord du précipice financier.

Sur les trois prochaines années, le gouvernement sud-africain veut baisser la masse salariale du secteur public de 10 milliards de dollars au total. C'est ce qu'a annoncé Tito Moweni, le ministre de l'économie et des finances, hier mercredi 26 février, devant le Parlement. C'est le prix à payer si l'Etat veut éviter de freiner la consommation en augmentant la TVA. C'est aussi le prix à payer pour ne pas toucher au taux d'impôt sur les sociétés. 

Car, la nation la plus industrialisée du continent est devenue un géant au pieds d'argile. Son déficit udgétaire atteint 6,8%, soit sn niveau le plus élevé depuis 2012, soit bien avant la fin de l'Apartheid. De plus, la croissance demeure molle (0,9%), , le chômage de masse atteint le niveau record de 30% et, plus récemment, les pannes d'électricité à répétition ont paralysé le tissu productif. En somme, les plaies qui gangrènent l'économie sont nombreuses. 

Le président Cyril Ramaphosa a lui-même reconnu sans détour la gravité de la situation la semaine dernière lors de son discours sur l'état de la Nation. 

La dette publique "atteint des niveaux insoutenables" et "l'économie n'a pas renoué avec une croissance significative depuis une décennie", a-t-il déploré devant les parlementaires.

Deux ans après le départ anticipé de son prédécesseur Jacob Zuma pour cause de scandales de corruption à répétition, le bilan dressé par M. Ramaphosa sonne comme un constat d'échec.

Cyril Ramaphosa, présenté comme "le fils préféré" de l'icône Nelson Mandela, le premier président noir sud-africain (1994-1999), dirige le pays depuis le 15 février 2018, après la démission forcée de Jacob Zuma.

En prenant les rênes du pays en février 2018, l'ex-syndicaliste des heures sombres de l'apartheid reconverti en capitaine d'industrie s'était pourtant fait fort de relancer le pays en y faisant revenir les investisseurs étrangers.

Sans succès jusque-là. Le produit national brut (PNB) sud-africain n'a pas dépassé 1,3% ces cinq dernières années et devrait péniblement s'établir à 0,5% en 2019.

"Le gouvernement reste incapable d'imposer politiquement les réformes drastiques qu'il a promises", note Darias Jonker, du centre d'analyse Eurasia Group. Il s'est montré "incapable de réduire les déficits", renchérit l'économiste en chef de l'Old Mutual Investment Group, Johann Els.

- Dégradation annoncée -

Avec une dette publique proche de 60% du PNB, sa marge de manoeuvre s'annonce des plus limitées.

Le ministre des Finances se sait en outre sous la menace d'une dégradation de la note financière de l'Afrique du Sud par l'agence Moody's, la seule des trois grandes à ne pas l'avoir encore dégradée au rang d'investissement spéculatif.

Fitch and S&P l'ont reléguée dans cette catégorie dès 2017.

"Nous ne sommes plus très loin d'une dégradation de Moody's. Si nous ne stabilisons pas le déficit et ne contrôlons pas nos dépenses, ils n'hésiteront pas à le faire", avertit Johann Els.

Une telle sanction pourrait causer un exode des investisseurs et accroître la pression sur la devise locale, le rand.

De l'avis de tous les analystes, les mauvaises performances de l'économie sud-africaine sont largement imputables à sa mauvaise gestion, ainsi que l'illustre la situation financière inquiétante des entreprises publiques du pays.

L'Etat est contraint de renflouer régulièrement les caisses des deux plus emblématique d'entre elles, le géant de l'électricité Eskom et la compagnie South African Airways. Les difficultés du premier ont même convaincu la Banque mondiale d'abaisser sous les 1% sa prévision de croissance pour 2020.

"Le gouvernement doit s'éloigner au plus vite de la culture des dépenses de consommation pour privilégier les investissements dans les infrastructures", recommande Azar Jammine, l'économiste en chef du consultant Econometrix.

L'opposition, elle, agite déjà la menace d'une "crise fiscale".

"L'insuffisance de la croissance exclut de nouveaux impôts pour accroître les recettes", a estimé le député Geordin Hill-Lewis, en charge des Finances au sein de l'Alliande démocratique (DA).

Le ministre "doit présenter un plan crédible pour stabiliser la dette nationale et contenir le déficit budgétaire", a-t-il ajouté.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 27/02/2020 à 12h15, mis à jour le 27/02/2020 à 12h19