Les risques de violences demeurent élevés à la veille des élections dimanche en République démocratique du Congo où les deux principaux candidats de l'opposition ont refusé de signer un document "pour la paix" sous prétexte qu'il n'intègre pas leurs amendements.
Les deux opposants, Martin Fayulu et Félix Tshisekedi, ont rejeté ce texte signé par le candidat de la majorité, Emmanuel Ramazani Shadary, et par le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), Corneille Nangaa.
Ce texte est un "engagement pour la paix, pour des scrutins transparents, apaisés et non violents", a déclaré le président de la Céni, Corneille Nangaa, qui l'a signé en qualité de "témoin".
Par ce texte, les candidats auraient dû s'engager à rejeter "la violence sous toutes ses formes".
Lire aussi : RDC. Présidentielle: entre incertitudes et inquiétudes à J-1
Les amendements de l'opposition demandaient à la Céni d'assurer le "bon déroulement des scrutins", d'"assurer le comptage manuel des bulletins de vote", d'accréditer tous les "témoins" (observateurs), et de les autoriser à assister au dépouillement.
Le texte a été évoqué pour la première fois lors d'une réunion tenue vendredi à l'initiative des médiateurs de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) pour faire baisser la tension.
Les deux opposants ont promis de signer le texte en soirée - s'il est amendé.
Soucieux également d'apaiser les esprits, catholiques et protestants ont célébré samedi matin un culte oecuménique pour la paix.
"Des inquiétudes planent encore sur nos têtes et la peur couve dans nos cœurs", a déclaré l'archevêque de Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo. "La divergence d'idées n'est pas une raison pour mettre le feu au pays".
Le chef de l'Eglise du christ du Congo (ECC, protestant), André Bokundowa, a encouragé la Céni "à organiser les élections demain dimanche sur toute l'étendue de la République".
Le scrutin a été reporté dans trois zones, dont Beni-Butembo, victimes d'Ebola et de violences.
De son côté, la police a prévenu qu'elle éloignerait toute personne qui resterait à proximité des centres de vote à l'heure du dépouillement dimanche soir.
Lire aussi : RDC. Présidentielle: la "génération Kabila" risque de faire pencher la balance
Une personne au moins s'est montrée confiante samedi: le président sortant Joseph Kabila, contraint de quitter le pouvoir par la Constitution. "J’ai l’intime conviction que tout va bien se passer dimanche", a-t-il déclaré dans un entretien au journal français Le Monde. "Des violences post-électorales ne sont pas à exclure, mais la menace sécuritaire est sous contrôle".La présidentielle doit désigner dimanche son successeur à la tête du plus grand pays d'Afrique sub-saharienne qui n'a jamais connu de transmission pacifique du pouvoir. Des législatives et provinciales sont prévues le même jour.
Les bureaux de vote doivent ouvrir de 06H00 à 17h00.
Personnel absent
Cela veut dire que les bureaux doivent ouvrir à 04H00 GMT dans l'Est et 05H00 GMT dans l'Ouest dans le seul pays d'Afrique à cheval sur deux fuseaux horaires (2,3 millions de km 2 et neuf frontières).
Les bureaux seront-ils prêts? Les "machines à voter", branchées et rechargées?
A Kinshasa samedi après-midi, les "machines à voter" n'étaient pas sorties de leur valise noire dans trois centres de vote visitées par un photographe de l'AFP à Matonge et Victoire.
Lire aussi : RDC. Présidentielle: l'ONU dénonce des violences à l'égard des opposants
A Goma, le matériel ne sera installé que tard samedi "pour des raisons de sécurité", explique Élisée, l'un des responsables du centre de vote de l'école primaire Katembere. "Et nous dormirons sur place pour veiller au matériel".
Six machines à voter ont été installées dans autant de bureaux de vote à Tshikapa (Kasaï, centre), a constaté un correspondant de l'AFP. Dans cette ville, la Céni a organisé une caravane de 107 motos pour rassurer les électeurs et les inviter à voter.
La RDC a refusé toute mission d'observation électorale européenne ou américaine pour les élections les plus importantes de son histoire.
Quelques centaines d'observateurs africains (Union africaine, SADC...) sont annoncés pour les opérations de vote qui concernent désormais moins de 39 millions d'inscrits, après le report du vote à Beni, Butembo et Yumbi (1,3 million d'électeurs).
Des rédactions ont déploré de n'avoir pas pu renforcer leur petite équipe de journalistes sur place (Radio France internationale, France 24, la RTBF).
La Céni affirme que "67 journalistes étrangers ont été accrédités" pour la couverture des élections dans un pays grand comme l'Europe de l'Ouest.
Sur place, tous les envoyés spéciaux n'ont pas obtenu leur accréditation auprès de la Céni nécessaire pour suivre l'installation des bureaux de vote, l'ouverture, le déroulement du vote, le dépouillement...
La conférence épiscopale a annoncé que 99,57% de ses 41.026 observateurs formés avaient reçu leur accréditation.