"Le signal de RFI est coupé dans toutes les villes du Congo", a déclaré à l'AFP le porte-parole du pouvoir Lambert Mende.
"Nous n'allons pas laisser une station mettre de l'huile sur le feu au moment où nous attendons la compilation des résultats provisoires", a ajouté M. Mende.
Les résultats provisoires de l'élection présidentielle doivent être proclamés au plus tard dimanche par la Commission électorale nationale indépendante (Céni).
En jeu, la succession du président Joseph Kabila, premier dirigeant congolais à renoncer au pouvoir sous la pression de la Constitution depuis l'indépendance en 1960.
Trois prétendants se disputent la victoire, le dauphin et candidat du pouvoir Emmanuel Ramazani Shadary, et les deux opposants Félix Tshisekedi et Martin Fayulu.
Lire aussi : RD Congo: la coupure de RFI et de la radio de l'ONU par Kabila irrite Michaëlle Jean
RFI couvre abondamment l'actualité de la RDC, le plus grand pays au monde ayant le français pour langue officielle (environ 80 millions d'habitants). La radio française cite une enquête Afriscope/TNS Sofrès lui attribuant 40% des auditeurs congolais.
La correspondante de RFI a été privée de son accréditation sur décision des autorités congolaises.
Le porte-parole du pouvoir accuse la radio de proclamer "les résultats, les tendances, alors qu'il n'y a que le président de la Céni qui peut proclamer les résultats et les tendances".
La station "regrette le retrait de l'accréditation de sa correspondante à Kinshasa, Florence Morice, qui n’a exercé que son travail de journaliste professionnelle", s'est défendue la direction de RFI dans un communiqué.
La radio rappelle qu'elle "n'a donné aucun résultat" des scrutins présidentiel, législatifs et provinciaux de dimanche, "soutient pleinement sa correspondante et demande l'annulation de cette mesure de retrait d'accréditation et le rétablissement de sa diffusion".
Lire aussi : RDC: Radio France Internationale (RFI) coupée
Le recours pour la correspondante sera examiné en commission, d'après Mende. Le signal de RFI en RDC avait été coupé pendant plusieurs mois jusqu'en août 2017.
Soulèvement populaire
Dès lundi au lendemain du scrutin, les autorités ont demandé aux opérateurs de couper l'accès internet pour éviter "un soulèvement populaire", d'après un conseiller du président Kabila.
"Il y a des gens qui intoxiquaient la population avec de faux chiffres concernant les élections", a ajouté ce conseiller diplomatique, Barnabé Kikaya Bin Karubi.
Joseph Kabila, au pouvoir depuis l'assassinat de son père en 2001, élu en 2006, avait été réélu dans la contestation en 2011. Pour les scrutins de dimanche, l'opposition a de longue date critiqué l'emploi de "machines à voter", écrans tactiles utilisés pour choisir les candidats et qualifiés de "machines à tricher" par ses détracteurs.
Lire aussi : RDC. Présidentielle: Internet coupé à l'heure de la remontée des résultats
La coupure d'internet complique le travail des observateurs électoraux de la Conférence épiscopale qui ont retardé d'une journée, à jeudi, la présentation très attendue de leur rapport préliminaire sur les opérations de vote dimanche - pour lesquelles Kinshasa a refusé toute aide logistique des Nations unies et toute mission d'observation occidentale.
"On a voulu prendre un peu de temps étant donné que le travail se fait par téléphone", a expliqué à l'AFP le secrétaire général de la Conférence, l'abbé Donatien Nsholé.
La suspension de l'accès aux réseaux sociaux a été saluée par l'entourage du candidat du pouvoir et dénoncé par ses deux rivaux de l'opposition.
"Au niveau du candidat Shadary, nous sommes bien sûr certains de sa victoire, mais nous préférons attendre que la Commission électorale nationale indépendante se prononce dans quelques jours", a déclaré son porte-parole, Yves Kasombe, au micro de la radio Top Congo FM.
La coalition Lamuka autour du candidat d'opposition Martin Fayulu estime que la coupure internet "augure de la fraude et de la tricherie en train de se faire en ce moment précis", selon son directeur de campagne Pierre Lumbi joint par l'AFP.
Le même Pierre Lumbi avait déclaré lundi soir que Martin Fayulu était "largement en tête".
L'entourage de Félix Tshisekedi s'est déclaré sûr de la victoire de l'opposition. "Toute manipulation en changeant l'ordre d'arrivée à la présidentielle serait un scandale", a prévenu Jean-Marc Kabund.