Depuis le début de la semaine, les rues de Khartoum sont restées presque désertes, des habitants décrivant une situation de "terreur" avec la présence de paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF). Vendredi, seuls quelques magasins étaient ouverts et peu de véhicules en circulation.
Dans ce contexte, Ahmed doit rencontrer les dirigeants du Conseil militaire qui a pris le pouvoir après le renversement le 11 avril du président Omar el-Béchir sous la pression d'une contestation inédite déclenchée en décembre 2018.
Il doit ensuite voir des leaders de la contestation qui restent déterminés à obtenir un transfert du pouvoir aux civils.
"Nous avons reçu une invitation de l'ambassade d'Ethiopie à rencontrer le Premier ministre éthiopien à 11H00 (09H00 GMT) et nous y allons", a déclaré à l'AFP Omar al-Digeir, un dirigeant de la contestation.
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Après l'échec des pourparlers entre généraux et les chefs de la contestation, les forces de sécurité ont dispersé lundi par la force un sit-in, organisé dans le prolongement du mouvement de contestation et en place depuis le 6 avril devant le QG de l'armée à Khartoum.
Au moins 113 personnes sont mortes dans la répression, la grande majorité au sit-in, selon un dernier bilan des médecins proches de la contestation. Le gouvernement a fait état de 61 morts.
"Mesures punitives"
Les chefs de la contestation ont accusé les RSF, rattachées au puissant Service national de renseignements et de sécurité (NISS), d'avoir mené la répression et du climat de peur qui s'est emparé de Khartoum.
Des experts et des ONG ont comparé les RSF aux milices Janjawid accusées d'atrocités dans la région soudanaise du Darfour en proie à un conflit sanglant pendant plusieurs années.
Ces derniers jours, les membres des RSF, en uniformes beiges et lourdement armés, ont déambulé dans les rues de la capitale soudanaise ou circulé à bord de pick-up.
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La visite de Ahmed intervient au lendemain de la suspension de la participation du Soudan à l'Union africaine (UA) "jusqu'à l'établissement effectif d'une autorité civile de transition".
Le Sierra-Léonais Patrick Kapuwa, président en exercice du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, a déclaré que cette institution "imposera automatiquement des mesures punitives sur les individus et les entités qui ont empêché l'établissement d'une autorité civile".
La position de l'UA a été saluée par l'Union européenne (UE) qui a aussi réclamé "la cessation immédiate de la violence et une enquête crédible sur les événements criminels".
"Les négociations avec l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC, fer de lance de la contestation) en vue de la mise en place d'une autorité de transition dirigée par des civils doivent reprendre", a ajouté l'UE.
"Message fort"
Les Etats-Unis ont aussi salué "le message fort" de l'UA "aux forces de sécurité du Soudan pour le meurtre de civils innocents et pour avoir exigé le transfert du pouvoir à un gouvernement dirigé par des civils".
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Après la destitution et l'arrestation par l'armée de Béchir le 11 avril, les protestataires avaient continué de camper devant le QG de l'armée, réclamant le départ des généraux et le transfert du pouvoir aux civils.
Mais les négociations entre militaires et chefs de la contestation ont été suspendues le 20 mai, chaque camp refusant de céder à l'autre la direction de la transition post-Béchir censée durer trois ans.
Après la répression, les leaders de la contestation ont annoncé rompre "tout contact" avec les généraux et rejeté tout dialogue avec un Conseil qui "tue des gens". Ils ont appelé à une "grève indéfinie" et à la "désobéissance civile" jusqu'au "renversement du régime".
Le Conseil militaire, après avoir dans un premier temps dit vouloir cesser les pourparlers, a ensuite dit être "ouvert" à des négociations.
Les soutiens des généraux au pouvoir, l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l'Egypte, qui n'ont pas explicitement condamné les violences, ont toutefois appelé au "dialogue" entre les deux parties.