Meurtre de George Floyd: "Trop c'est trop", disent les ex-chefs d'État africains

Nicéphore Soglo, ex-président du Bénin et actuel président du Forum des anciens chefs d'Etat et de gouvernement africains.

Nicéphore Soglo, ex-président du Bénin et actuel président du Forum des anciens chefs d'Etat et de gouvernement africains. . DR

Le 02/06/2020 à 17h59, mis à jour le 03/06/2020 à 18h38

Si les présidents africains en exercice ont choisi de faire profil bas concernant le meurtre de l'Africain-Américain George Floyd, leurs prédécesseurs, eux, ont diffusé un long communiqué, hier lundi 1er juin, pour le dénoncer de la manière la plus vigoureuse.

Au vu de la réaction des anciens chefs d'Etat africains, le meurtre du Noir-Américain George Floyd les a irrités au plus haut point. "Qui oserait ainsi, à visage découvert, traiter de la sorte de nos jours un Européen, un Arabe, un Israélien, un Indien, un Chinois, un Japonais, un Argentin ou un Chilien? Trop, c’est trop!", ont-ils écrit dans un communiqué rendu public ce lundi 1er juin. Ils viennent ainsi ôter une épine du pied de leurs successeurs, actuellement au pouvoir, et qui se sentent empêchés de s'exprimer de façon aussi catégorique, pour des raisons évidentes.

Après les propos très durs de la diplomatie américaine contre la Chine, l'un des rares pays à avoir dénoncé le meurtre de George Floyd, il est probable que bon nombre de chefs d'Etat africains qui en avaient l'intention se sont ravisés. Ils ont pu craindre de s’attirer le courroux de l'Oncle Sam, malgré l'indignation générale de leur opinion publique. Seul le Zimbabwe d'Emerson Mnangagwa, aux relations tumultueuses assumées avec les Etats-Unis, a osé convoquer l'ambassadeur américain.

En revanche, les ex-présidents ou anciens Premiers ministres, semblent avoir plus de marge de manœuvre et ne se sont pas privés de condamner vigoureusement ce meurtre.

Ainsi, "le Forum des anciens chefs d'Etat et de gouvernement d’Afrique est profondément choqué, indigné et dévasté par les crimes à répétition dont est victime la communauté noire aux Etats-Unis d'Amérique et dont le dernier en date est celui de George Floyd le 25 mai 2020 dans une rue de Minneapolis", écrivent-ils dans leur communiqué.

Ils n'ont pas hésité, sans le dire explicitement, à faire un rapprochement avec la Shoah, l'extermination des juifs européens par les Nazis. Ce qui témoigne de leur amertume face à cet énième incident.

En effet, ils invitent Donald Trump, "à prendre de toute urgence, les mesures adéquates pour mettre un terme à ces violences et à ces meurtres qui rappellent, hélas, les crimes commis contre les minorités au cours de la seconde guerre mondiale en Europe".

Par ailleurs, ils se sont dits solidaires et ont même apporté leur "appui à toutes les mesures que le mouvement noir américain «Black Lives Matter», les responsables et les élus noirs jugeront utiles de prendre pour mettre un terme à ces provocations répétées et à la barbarie filmée à dessein par les suprématistes blancs".

"Quel niveau de cruauté faut-il atteindre pour que le monde entier se réveille enfin et manifeste son indignation ?", s'interroge Nicéphore Soglo, l'ancien président béninois qui a signé le communiqué et qui dirige cette sorte de club des sages.

"Nos peuples, nos femmes surtout notre immense jeunesse jugent à présent le monde entier à sa réaction face à cette barbarie et à ces crimes à répétition. Ils sont à la bonne école et enregistrent méthodiquement et ont de la mémoire", poursuit le président Soglo.

Enfin, "le Forum des anciens chefs d’Etat et de gouvernement d’Afrique en appelle à tous les gouvernements du continent africain pour élever une vive protestation contre l’ignoble mise à mort de George Floyd tout en exigeant que les auteurs de ce crime et de tous les autres crimes du genre soient punis avec la dernière rigueur".

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 02/06/2020 à 17h59, mis à jour le 03/06/2020 à 18h38