Vidéo. Egypte: le chauffeur de Touc-Touc qui fait trembler Al Sissi

VidéoDepuis une semaine les réseaux sociaux égyptiens n'en ont que pour Moustapha. Le conducteur de Touc-Touc, ces triporteurs qui servent de taxi dans les rues du Caire, est devenu malgré lui le porte-voix de tous les frustrés qui voient sombrer l'Egypte dans la crise économique.

Le 18/10/2016 à 18h00, mis à jour le 18/10/2016 à 18h03

Quand "on regarde la télévision, l’Egypte ressemble à Vienne, mais si on descend dans la rue, on découvre qu’elle est la cousine de la Somalie". La déclaration de cet anonyme Egyptien est en train de faire trembler Abdelfattah Al Sissi et son régime. Moustapha, le chauffeur de Touc-Touc du Caire a eu un discours très dur envers les gouvernants. Il s’exprimait dans l’émission "Wahid minan nass", "quelqu’un du peuple", du 12 octobre produite par une chaîne privée Al Hayat.

Le verbe tranchant de ce chauffeur de tricycles a été largement commenté dans les réseaux sociaux. Et depuis, la diffusion de l’émission, le sommet de l’Etat semble en trembler. "Certains ennemis de l’Egypte n’hésitent pas d'instrumentaliser les réseaux sociaux pour nuire", a explqiué Al-Sissi lors d’une rencontre avec les rédacteurs en chefs de la presse gouvernementale, trois jours après la diffusion de la vidéo.

Visiblement la vidéo a eu plusieurs implications. En effet, l’émission a été temporairement arrêtée. Officiellement, le journaliste Amr Al Leissy qui en est l’animateur a pris des vacances. Mais les réseaux sociaux pensent qu’il s’agit d’une mise à l’écart. De plus, le chauffeur de touc-touc a également été interrogé par la police et il aurait quitté Le Caire pour protéger sa famille.

Tout ceci à cause d’une vidéo? En réalité, en écoutant les paroles, on comprend qu’il ne s’agit pas d’un simple discours anodin que tient un chauffeur qui ne parvient pas à joindre les deux bouts. Moustapha est très éloquent et tire son coup de gueule de ses entrailles. On a la vague impression qu’il n’est pas le simple "diplômé en Touc-Touc" qu’il dit être. Il dénonce notamment l’inflation qui rend impossible la vie des Egyptiens. De même, il s’insurge contre l’administration dont les services se dégradent à vue d’œil. Selon lui l’Egypte n’a plus ni sucre, ni riz, alors qu’elle en exportait avant l’élection d’Abdelfattah Al Sissi en 2014. "Il faut qu’on donne des explications", lance-t-il outré.

"L’Egypte avec toutes ses institutions, son armée, son Parlement, sa police secrète, ses vingt ministères peut-elle être dans une situation pareille". Selon lui, "l’éducation, la santé et l’alimentation", font tellement défaut qu’il n’est pas nécessaire d’avoir d’autres ambitions.

Quoi qu’il en soit, la vidéo sur la page Facebook d’Al Hayat a été visualisée près 7 millions de fois, sans compte les vues secondaires, puisque la vidéo a été reproduite un peu partout sur le web égyptien. Très vite, les réseaux sociaux ont créé le hashtag en langue arabe "#JeSuisDiplôméEnToucTouc" en guise de solidarité avec cet égyptien de la classe populaire égyptienne.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 18/10/2016 à 18h00, mis à jour le 18/10/2016 à 18h03