Cameroun: un test du VIH Sida, exigé par l’Eglise catholique pour ses recrutements, fait polémique

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Le 29/10/2019 à 12h01

Une offre d’emploi du diocèse de Kribi, dans le sud du pays, exige que les candidats fournissent, parmi les pièces dans leur dossier, le résultat du test de VIH-sida. Cette exigence suscite la colère de l’Ordre national des médecins, qui crie à une atteinte au secret professionnel.

Un avis de recrutement, lancé le 23 octobre 2019 par le diocèse de Kribi, ville balnéaire située dans le Sud du Cameroun, est au cœur d’une vive polémique.

A l’origine du scandale, un «certificat médical avec test VIH de moins de 3 mois» exigé des candidats parmi les pièces à fournir lors de la constitution de leur dossier.

Cette «obligation» a fait monter au créneau l’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC), qui crie à une atteinte au secret professionnel.

«Nous attirons votre attention sur le caractère très irrégulier et même illégal de cette disposition car, en plus d’être attentatoire au secret médical, elle conduira obligatoirement à la discrimination, voire la stigmatisation des éventuels candidats présentant une sérologie positive», écrit l’Ordre dans une correspondance adressée le 25 octobre dernier au chancelier du diocèse de Kribi, l’abbé Daniel Jonathan Mba Ngogo, qui a signé cet avis de recrutement.

«Soyez aussi informé que ce genre de pratiques sont formellement déconseillées par les organismes nationaux et internationaux de lutte contre la pandémie du Sida», poursuit l'Ordre des médecins, qui rappelle également dans ce courrier que le test de VIH est «volontaire et non obligatoire» dans le pays.

Aussi, l’ONMC, garant des bonnes pratiques, de l’éthique et la déontologie médicales, a-t-il prié le diocèse de Kribi «de procéder sans délai au retrait du test de VIH de la composition du dossier de recrutement».

La loi du 10 août 1990 relative à l’exercice et à l’organisation de la profession médicale au Cameroun stipule en effet que le médecin est astreint au secret professionnel, qu’il exerce dans l’administration ou en clientèle privée.

En communiquant le diagnostic de séropositivité à des tiers, le diocèse viole ainsi la loi.

Toutefois, il faut souligner qu’il n'existe pas, dans le Code pénal camerounais, un texte de loi régissant des infractions qui relèveraient exclusivement du domaine médical. 

Malgré de multiples tentatives de joindre le diocèse de Kribi par Le360 Afrique, aucun interlocuteur n'a pu être joint. 

Selon les données communiquées en 2018 par le Comité national de lutte contre le sida, le taux de prévalence de cette maladie est de 3,4% au Cameroun, contre 4,3% en 2011 et 3,9% en 2016.

Quelques 540.000 personnes vivent avec le virus du sida en 2018 dans le pays, et 18.000 décès liés à cette maladie ont été enregistrés l'an dernier, indique le Programme commun des Nations unies sur le VIH-sida (Onusida).

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 29/10/2019 à 12h01