Afrique. Covid-19: plusieurs pays déconfinent pour raisons économiques

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Le 05/05/2020 à 13h01, mis à jour le 06/05/2020 à 16h14

Plusieurs pays du continent ont entamé leur phase de déconfinement, ravivant les craintes d'un rythme de contamination à la hausse qui pourrait échapper aux autorités. Les détails.

Afrique du Sud: crainte d'une hausse des cas

C'est vendredi 1er mai que l'Afrique du Sud a autorisé le déconfinement, après 35 jours ayant permis de ralentir considérablement l'évolution de la maladie. En tout cas, c'est qu'ont affirmé les autorités sanitaires du pays, même si le nombre de cas a été multiplié par cinq sur cette période. En effet, le nombre de cas confirmés est passé de 1.075 à la date du 27 mars à 5.647 individus testés positifs le 30 avril. A titre de comparaison, le Sénégal qui a choisi le confinement partiel a également vu le nombre d'infections quintupler au cours du mois d'avril.

Néanmoins, l'Afrique du Sud reste le pays le plus touché sur le continent avec 7.220 cas confirmés. C'est aussi le 4e pays en termes de décès qui sont au nombre de 131.

Tout le monde craint une croissance exponentielle de la contamination, puisque les quatre derniers jours ont été marqués par près de 1.600 nouveaux cas, soit une moyenne quotidienne de 400 infections. Un véritable record sur le continent. Or, ces nouveaux cas ont été sans doute contaminés durant la période de confinement, ce qui laisse penser qu'en changeant les règles sanitaires, le pays s'expose à de sombres perspectives.

L'unique raison de ce déconfinement est économique, puisqu'une étude publiée la semaine dernière montre qu'une entreprise sur trois pourrait faire faillite si elle devait rester un mois sans revenu. Dans la nation la plus industrialisée du continent, c'est un risque qu'il ne faut pas prendre, d'autant que l'économie devrait se contracter de plus de 6% cette année.

Rwanda: la prudence est de mise

Le Rwanda, premier pays d'Afrique subsaharienne à avoir adopté le confinement total, a entamé sa phase de déconfinement partiel et progressif ce lundi 4 mai. Seules les églises, les mosquées et les écoles restent encore fermées. Le pays a donc choisi de déconfiner d'abord les entreprises, mais quand le télétravail est possible, le gouvernement l'encourage.

En revanche, les hôtels et restaurants sont à nouveau en activité, mais ne sont ouverts qu'en journée. Dans la foulée, le service de transport en commun de voyageurs a repris dans les villes. Dans cette première phase, le Rwanda garde ses frontières fermées.

Pour le moment, le Rwanda ne compte aucun décès lié à la pandémie du Covid-19, bien qu'il ait 261 cas confirmés.

Nigeria: Kano reste confinée avec ses mystérieux décès

Au Nigeria, les habitants de Lagos et de la plupart des grandes villes du pays peuvent désormais librement vaquer à leurs occupations, dans la journée, à partir de 6h du matin, jusqu'en début de soirée à 20h. Après, c'est le couvre-feu durant toute la nuit. L'unique contrainte réelle est le port obligatoire du masque et les populations sont appelées à respecter les règles de distanciation sociale ainsi que les autres gestes barrières comme le lavage régulier des mains.

En revanche, dans le nord du pays, dans l'Etat de Kano, le confinement est toujours de rigueur, à cause de la pandémie qui a atteint des proportions jusqu'ici insoupçonnées. En effet, des dizaines de morts enregistrées récemment et qui étaient restaient inexpliquées sont aujourd'hui identifiées comme directement liées au nouveau coronavirus par la Task force Covid-19 mise en place le président Muahammadu Buhari, afin de comprendre ce qui se passait dans la deuxième ville la plus peuplée du pays après Lagos.

"Bien que les décès aient été attribués initialement à d'autres maladies, nous pouvons dire désormais que la cause principale de l'explosion de morts à Kano est due au coronavirus", a reconnu Nasiru Sani Gwarzo, qui dirige cette équipe.

Burkina Faso: le déconfinement sous la pression

Si un pays pouvait se targuer d'avoir stoppé net la progression de la pandémie, c'était bien le Burkina Faso dont le nombre de cas quotidiens ne dépassait pas la dizaine et était même autour de 3 à 5 dans la semaine du 23 au 30 avril. Une véritable prouesse lorsqu'on sait que le pays était présenté comme l'un de ceux où la pandémie avançait le plus rapidement.

Ce déconfinement a été décidé sous la forte pression des religieux, mais aussi des commerçants et de nombreuses personnes qui vivant au jour le jour avaient un besoin urgent de rependre leurs activités professionnelles pour pouvoir se nourrir. 

Néanmoins, tout le monde craint une nouvelle phase de forte augmentation des contaminations, alors que tout était sous contrôle.

Le Burkina Faso compte quelque 46 décès, ce qui en fait le 9e pays le plus affecté sur le continent.

Tunisie: déconfinement polémique

En Tunisie, l'un des pays où la pandémie est la mieux maîtrisée au monde, le déconfinement a été autant un soulagement pour les 12 millions d'habitants du pays qu'une source de polémique. En effet, le gouvernement avait suggéré aux mères d'enfants de moins de 15 ans de rester à la maison, ce qui a été largement critiqué sur les réseaux sociaux. Finalement, le gouvernement a fait machine arrière en laissant aux femmes la liberté de choisir: rester à la maison surveiller leur progéniture ou se rendre au travail.

Il s'agit là aussi d'un déconfinement plutôt économique permettant aux entreprises, mais aussi à la fonction publique, de travailler jusqu'à la moitié de leurs capacités. Cependant, le port du masque devient obligatoire et jusqu'au 24 mai, les autorisations à circuler sont nécessaires.

Pour le moment, la Tunisie comptabilise officiellement 1.018 cas et 43 décès seulement, et le nombre de malades sous traitement n'est que de 569.

Algérie: menace du président Tebboune

Contre l'avis du corps médical, le gouvernement algérien a décidé de déconfiner afin de permettre aux fidèles de passer un meilleur mois de ramadan. Les craintes de Bekkat Berkani, président de l'ordre des médecins, ont été confirmées avec la reprise des contaminations qui ont atteint une moyenne quotidienne de 149 cas confirmés, faisant passer le cumul de 3.007 à 4.648 entre le 24 avril et le 4 mai.

D'où un recul des autorités. Ce week-end, certains walis ont fermé des lieux de commerce, après la menace clairement exprimée par le président Abdelmadjid Tebboune de tout arrêter si les contaminations continuaient à ce rythme.

Pour le moment, l'Algérie est le pays qui compte le plus de décès sur le continent avec quelque 465 victimes, soit un taux de mortalité supérieur à 10% à ce stade de la pandémie, ce qui est largement supérieur à la moyenne mondiale autour de 7% et à la moyenne africaine qui est de 4,2% au regard des cas déclarés.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 05/05/2020 à 13h01, mis à jour le 06/05/2020 à 16h14