Tchad: un colonel de l'armée condamné, exfiltré du tribunal par sa famille

Le colonel de l'armée tchadienne était accusé d'avoir tué un mécanicien lors d'une altercation.

Le colonel de l'armée tchadienne était accusé d'avoir tué un mécanicien lors d'une altercation. . DR

Le 17/09/2020 à 15h45, mis à jour le 17/09/2020 à 15h50

Un colonel de l'armée tchadienne a été extirpé jeudi par des membres de sa famille d'un tribunal de N'Djamena à l'énoncé du verdict le condamnant à 5 ans de prison ferme, selon la Ligue des droits de l'Homme et le ministre de la Justice.

L'officier supérieur, Abdoulaye Ahmat Haroun, avait tiré à bout portant sur deux jeunes mécaniciens le 14 juillet et tué l'un d'entre eux avant d'être violemment passé à tabac par une foule en colère.

La diffusion de la vidéo de la scène et de vifs débats sur les réseaux sociaux avaient amené début août le gouvernement à faire réduire considérablement le débit de l'internet dans le pays, une mesure dénoncée comme une censure par les défenseurs des droits humains.

Lorsque le président du tribunal a énoncé le verdict condamnant le colonel pour meurtre, "des hommes et des femmes de sa famille arrivés en masse l'ont extirpé du box des accusés pour l'emmener vers une destination inconnue et ont traité le juge d'esclave", a assuré devant la presse le président de la Ligue Tchadienne des Droits de l'Homme (LTDH), Maxvelt Loalngar.

"Des jeunes et des femmes ont simulé une rixe pour s'enfuir" avec le colonel, a confirmé à l'AFP le ministre de la Justice Djimet Arabi, assurant que "des instructions ont été données pour chercher le fugitif et le ramener à la maison d'arrêt".

"Des femmes et des hommes (...) se sont incrustés avec des armes de guerre dans le palais de justice, c'est inadmissible", a dénoncé M. Loalngar.

La vidéo du début de lynchage du colonel était devenue virale sur les réseaux sociaux et avait déclenché un vif débat, nombre d'internautes affirmant que le militaire, de la même ethnie que le président Idriss Deby Itno qui dirige le pays d'une main de fer depuis 30 ans, avait agit en toute "impunité" et dénonçant ce qu'ils considèrent comme "la loi d'une minorité" sur le reste du peuple Tchadien.

Cette vidéo et ces débats, ainsi que d'autres selon les autorités, avaient conduit le gouvernement à réduire considérablement le débit de l'internet début août, "temporairement", pour éviter la "propagation des messages d'incitation à la haine et à la division".

Le débit habituel n'est toujours pas rétabli à ce jour.

"WhatsApp et VPN ne sont pas créés pour s'insulter, pour cultiver la déchirure du tissu national ou pour critiquer des ethnies", avait plaidé M. Déby le 31 juillet, sans évoquer spécifiquement ce drame.

Le 9 août, le colonel Haroun s'était envolé à bord d'un avion à destination de l'Egypte, contraignant le Tchad à ordonner que l'appareil d'Egypt Air revienne à N'Djamena et à incarcérer le fugitif dès l'atterrissage.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 17/09/2020 à 15h45, mis à jour le 17/09/2020 à 15h50