Cameroun: qu’en est-il des langues maternelles

L'enseignement des langues maternelles au Cameroun.

Le 29/02/2024 à 15h40

VidéoComment font les vivants pour prendre langue avec les ancêtres vénérés jusqu’au culte et qui ne sont plus de ce monde? Par l’intermédiaire des dialectes hérités des aïeux, répond un professeur de l’université de Yaoundé. Ce bon sens explique l’intérêt accordé par les autorités du pays à l’enseignement des langues maternelles depuis les petites classes.

Cela fait quasiment un quart de siècle que l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) a institué la Journée mondiale des langues maternelles, célébrée le 21 février de chaque année. Selon l’Unesco «Les études soulignent les avantages de l’utilisation de la langue maternelle dans l’enseignement, car elle favorise de meilleurs résultats d’apprentissage, l’estime de soi et l’esprit critique».

Ce constat est particulièrement valable en Afrique riche d’une multitude de langues locales qui «expriment une certaine vision du monde». Il n’est ignoré de personne que l’Africain s’identifie par des valeurs spirituelles qui le situent entre le visible et l’invisible. Le professeur Bingono Bingono, un anthropologue enseignant à l’université de Yaoundé I estime que «En Afrique, il est admis que les morts ne sont pas morts. Alors, comment fait-on pour s’adresser aux ancêtres, aux génies et aux esprits? Cela ne peut être possible que dans nos langues maternelles et non dans une langue occidentale. A partir des langues locales et le respect des autres réalités culturelles des peuples, les pays africains peuvent se développer».

Le gouvernement camerounais l’a certainement compris, raison pour laquelle les langues maternelles ont été introduites dans le système éducatif national.

A ce jour, de nombreuses langues locales sont enseignées dans les écoles maternelles, primaires et secondaires des dix régions du pays.

Un responsable d’un établissement scolaire privé basé à Yaoundé en témoigne: «C’est depuis cinq ans que nous enseignons la langue Ewondo dans notre établissement. Et nos élèves sont systématiquement évalués dans cette matière comme dans d’autres. Au début, c’était difficile mais avec le temps les élèves et nos enseignants se sont adaptés».

Nana Valérie explique que le choix de la langue Ewondo est celui du gouvernement en rapport avec la situation géographique de l’établissement scolaire. Soit une langue par région. Loin des établissements scolaires, elles sont nombreuses les associations qui ont pour but la promotion et la valorisation des langues maternelles. Tous ces acteurs entendent garder la flamme car il n’existe aucun peuple sans sa culture.

Par Jean-Paul Mbia (Yaounde, correspondance)
Le 29/02/2024 à 15h40