La Tunisie sur une liste négative du FMI: les perspectives économiques assombries par les difficultés de financement

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Le 09/01/2024 à 10h14

La dernière décision du Fonds monétaire international (FMI) d’inscrire la Tunisie sur sa liste noire suite au retard dans la conclusion des consultations risque de chambouler les prévisions économiques dans le pays qui voit ses marges de manœuvre restreintes par cette nouvelle tournure.

Les perspectives d’accéder à des nouveaux financements tant cruciaux en ce temps de crise se sont assombries davantage après que l’institution financière mondiale ait révélé la liste des pays membres qui ont retardé leurs consultations en vertu de l’article IV ou leurs évaluations obligatoires de la stabilité financière pour une période dépassant 18 mois, en plus de la période régulière accordée, qui est de 15 mois.

L’inscription de la Tunisie, pour la première fois depuis son adhésion au FMI en 1958, sur la liste noire du Fonds monétaire international a relancé de nouveau le débat sur la nécessité de trouver des réformes urgentes à la crise économique dans le pays et de regagner la confiance des bailleurs de fonds à l’échelle internationale.

Ce reclassement intervient également alors que le pays attend un prêt de l’institution financière de près de deux milliards de dollars censé redonner une bouffée d’oxygène à l’économie tunisienne dont la situation ne cesse de s’aggraver.

Le nouveau coup dur à l’économie tunisienne n’est pas passé inaperçu auprès des analystes et des fins connaisseurs du paysage économique local unanimes quant à l’impact négatif d’un tel développement sur la soutenabilité des finances publiques et les perspectives de croissance.

Pour l’économiste Aram Belhadj, cette inscription compliquerait davantage le processus d’accès au financement externe pour la Tunisie, rappelant que le pays faisait déjà face à de grandes difficultés pour obtenir un financement extérieur avant le rapport du FMI.

De plus, de nombreux pays lient le décaissement de leur aide à la Tunisie à la nécessité de parvenir à un accord avec le FMI, ce qui pourrait également être impacté par cette situation, estime l’expert.

De son côté, l’universitaire Ridha Chkoundali a alerté sur la situation des réserves en devises qui nécessite de diverses sources pour leur alimentation, à défaut desquelles, le pays aura des difficultés à s’approvisionner en produits de base, en équipements et machines ainsi qu’en matières premières.

Et de s’interroger sur la capacité de la Tunisie à trouver des alternatives au financement du FMI, sachant que «la Loi de finances 2024 a écarté le fait de contracter des emprunts auprès d’autres parties».

Avant son placement sur la liste négative, le directeur général du FMI a adressé une correspondance au Gouverneur de la Banque centrale tunisienne, soulignant l’impératif pour la Tunisie de se conformer à l’obligation de consultations. Plusieurs observateurs ne s’attendaient pas à une issue proche de cette crise, après le report par le FMI de sa visite en Tunisie, prévue du 5 au 17 décembre 2023, à la demande des autorités tunisiennes. Une source du FMI avait confirmé que le cadre de financement international reste prêt à entreprendre les consultations annuelles dans le cadre de l’article IV du FMI, concernant la revue de la performance économique de la Tunisie.

Selon plusieurs analyses, l’inclusion de la Tunisie par le FMI sur une liste négative nuit à ses intérêt économiques ainsi qu’à son image auprès des marchés financiers et des bailleurs de fonds. Les pays qui avaient manifesté une disposition à soutenir la Tunisie, même en dehors d’un programme avec le FMI, risquent désormais de conditionner leur appui à une reprise des consultations avec l’institution financière internationale.

La Tunisie est confrontée à une profonde crise économique et sociale avec une faible croissance, une inflation qui avoisine 11%, un chômage élevé et un endettement public qui dépasse 80 pc de son PIB.

Le pays est parvenu à conclure un accord préliminaire avec le FMI depuis le 15 octobre 2022, en vue d’obtenir un prêt de 1,9 milliard de dollars, remboursable sur une période de 48 mois. La déprogrammation du dossier de la Tunisie de l’ordre du jour de son conseil d’administration réuni en janvier 2023, a relancé les spéculations et les polémiques sur les perspectives de cet accord censé insuffler une bouffée d’oxygène à l’économie du pays.

Pour donner son aval, le FMI s’attend à un engagement ferme des autorités tunisiennes à mettre en œuvre un programme de réformes pour restructurer les entreprises publiques tunisiennes accablées par un lourd endettement et lever les subventions sur certains produits de base.

Par Le360 Afrique (avec MAP)
Le 09/01/2024 à 10h14