Cinq militaires retraités condamnés à six mois de prison pour "outrage au chef de l’Etat" en Guinée

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Le 25/03/2016 à 17h16

Un tribunal de Conakry a condamné jeudi 24 mars cinq militaires retraités à six mois de prison ferme pour «diffamation et outrage à l’encontre du président Alpha Condé». Ils ont décidé de faire appel de la décision.

Mis à la retraite fin 2011 dans le cadre d’un programme de réforme des forces de défense et de sécurité, les cinq militaires, porte-paroles des 4000 militaires retraités, avaient organisé une conférence de presse en août 2015 au cours de laquelle ils réclamaient le paiement de leurs indemnités de départ et d’autres avantages pour une retraite dorée.Pendant ce même point de presse, ils avaient accusé le Gouvernement de détournement à des fins de campagne électorales leurs dus qu’ils estiment à plus de 15.000 dollars par personnes.Enfin, et c’est bien la goutte qui a fait débordé le vase, ces anciens militaires avait trouvé soupçonneux ce qu’ils appellent le silence coupable du président de la République face à leurs revendications.Pour le Tribunal de Première Instance de Mafanco dans la banlieue de Conakry, ces hommes se sont bel et bien rendus «coupables» de délits de diffamation et outrage au chef de l’Etat, et d’attroupement interdit.Les prévenus ont tous écopé de 6 mois d’emprisonnement ferme et d'une amende d’un million de francs guinéens chacun, tandis que sur l’action civile, ils ont été condamnés solidairement au paiement d’un franc symbolique au titre des dommages et intérêts au préjudice du président.Leur conseil prévoit de faire appel de la décision dès le 29 mars. Il estime que la condamnation à de la prison ferme n’a plus sa raison d’être dans un pays qui a légiféré sur la dépénalisation des délits par voie de presse.D’après Me Thierno Souleymane Baldé, ce verdict représente une réelle menace pour la liberté d’expression.«Si nous laissons passer ce cas-ci, rien ne nous dit qu’un autre juge ne va prendre une autre décision demain pour condamner à de la prison ferme un journaliste ou un avocat qui aurait commis un délit par voie de presse», s’est-il inquiété, joint par Le360.L’avocat dit avoir alerté les associations de presse du danger qui guette la liberté d’expression en Guinée.En attendant, un prévenu interpellé en septembre a déjà été remis en liberté pour avoir purgé sa peine. La libération des quatre autres est attendue le mois prochain.

Par Ougna Elie Camara (Conakry, correspondance)
Le 25/03/2016 à 17h16