Guinée: libération conditionnelle du chanteur ayant appelé à manifester

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Le 22/02/2017 à 14h16, mis à jour le 22/02/2017 à 14h20

Alors que les manifestations de lundi ont fait au moins cinq morts et 30 blessés, le chanteur de reggae Elie Kamano ne regrette pas d'avoir appelé à des actions de rue pour exiger la reprise des cours dans les universités et écoles du pays. Il bénéficie d'une libération conditionnelle.

"J'ai été arrêté et inculpé pour avoir dit quelques jours plus tôt qu'on descendrait dans les rues ", a reconnu l'artiste qui s'exprimait au lendemain de sa libération conditionnelle, dans l'émission "Les Grandes Gueules" de la radio Espace FM. C'est dans la même émission qu'il avait effectivement lancé, la semaine dernière, l'appel à manifester lundi 20 décembre au cas où le gouvernement n'arrivait pas à trouver un accord avec les syndicats de l'éducation pour la reprise des cours dans les écoles et universités du pays.

"J'ai mes deux enfants qui ne vont pas à l'école, alors que j'ai fini de payer leurs frais de scolarité... J'ai donc lancé cet appel comme père de famille, pas comme artiste ", a déclaré le chanteur qui a été inculpé pour complicité d'attroupements illégaux par un juge d'instruction du tribunal de première instance de Mafancon. " Pour une cause comme celle de l'éducation, si cet appel était à refaire, je le ferais", a-t-il poursuivi.

Pour l'instant, l'artiste ne relance pas son appel. Etant donné que le gouvernement et les syndicats sont parvenus à un accord pour la reprise des cours dès ce mercredi 22 décembre. Ce mardi, Elie Kamano s'est plutôt mué en sensibilisateur, encourageant les jeunes de certains quartiers chauds de Conakry à abandonner les violences pour reprendre les cours. " Si je le fais, c'est parce que nous avons obtenu ce que nous cherchions ; la repirse des cours", a-t-il expliqué.

Sauf que Kamano n'a pas été entendu par tous. Dans l'après-midi de ce mardi 21 février, des jeunes, qualifiés de loubards par certains citoyens, ont été la terreur des usagers de la route. Les violences ont fait mettre en sac des boutiques et une station-service à Conakry. 

"Je n'ai pas contacté la présidence"

Chez les Grandes Gueules, l'artiste est revenu sur les conditions de son arrestation intervenue dimanche 19 février. Il dit avoir été maltraité par les gendarmes qui sont venus l'arrêter manu militari dans son domicile situé au quartier Cosa. "Quand j'étais dans leur véhicule, il y en a qui disaient que je suis très audacieux, alors on devait me maitriser", a rapporté Elie. Par contre, le reggaeman dit n'avoir subi aucune violence durant les 24 heures de garde à vue à l'escadron de la gendarmerie de Matam.

Les rumeurs ont fait croire à Conakry qu'Elie a été libéré suite à un contact avec la Présidence de la République. "Personnellement, je n'ai jamais appelé à la présidence pour ma libération. Si telle a été le cas avec mon avocat, on me l'a jamais dit", a démenti l'artiste.

Si l'appel d'Elie Kamano n'est pas le seul facteur des violences de ce lundi, il en fait partie. D'ailleurs, certains manifestants n'ont pas manqué de motiver leur présence dans les rues de Conakry par l'arrestation du reggaeman. L'artiste populaire peut-il alors avoir quelque chose à se reprocher sur la mort de cinq personnes dans les violences de lundi ? Sur la question, Kamano n'est pas précis: "je n'avais pas les moyens de sortir. Si j'étais là, j'allais essayer de calmer les gens."

A Conakry, plusieurs analystes s'accordent à dire que l'arrestation d'Elie Kamano visait à désamorcer les manifestations à Conakry. Mais, au lieu de neutraliser les manifestations, cette arrestation les a plutôt revigorées...

Par Mamourou Sonomou (Conakry, correspondance)
Le 22/02/2017 à 14h16, mis à jour le 22/02/2017 à 14h20