Terrorisme au Sahel: difficile lecture des jeux d'alliances entre groupes djihadistes

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Le 21/10/2016 à 14h07, mis à jour le 21/10/2016 à 14h11

Le Sahel est écumé par de nombreux groupes terroristes. Ce foisonnement des groupuscules et les jeux d'alliances entre eux font qu'il est difficiles de comprendre le fonctionnement de ces nébuleuses qui frappent là où elles veulent et quand elles le veulent.

L’espace sahélien, notamment le Mali, le Burkina Faso et le Niger, a été le théâtre d’une série d’attentats terroristes au cours des dernières semaines.

La plus récente de ces actions violentes a été perpétrée le 17 octobre courant ciblant la prison de Kotokala, un centre de détention nigérien situé prés de la frontière avec le Mali, qui accueille des prisonniers terroristes.

Cette attaque a été revendiquée par l’Etat islamique (l’EI) à travers le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (MUJAO), son nouvel allié sous-régional, qui affirme avoir perdu «un frère combattant» au cours de l’opération, selon «Al Akhbar», un site mauritanien en ligne qui relaie régulièrement des messages authentifiés des organisations terroristes.

Par ailleurs, au cours des dernières semaines, un poste des douanes du Burkina Faso a fait l’objet d’une attaque terroriste.

Mais le soubresaut le plus sanglant de cette série est une action menée contre un camp de réfugiés maliens au Nord du Niger, avec un bilan de 22 soldats tués. Toutes ces attaques ainsi que l’enlèvement d’un humanitaire américain seraient imputables au Mujao, même si jusque-là certaines d’entre elles n’ont pas été formellement revendiquées, estime Moussa Ould Hamed, journaliste, ex-directeur général de l’Agence mauritanienne d’information (AMI), un organe du gouvernement, observateur attentif des questions de sécurité au Sahel.

Le Mujao et Ançar Dine se sont alliés à Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) pour occuper le nord du Mali de mars 2012 à janvier 2013.

Après l’opération «Serval» qui a chassé les groupuscules terroristes du septentrion malien, le Mujao a fait allégeance aux «Signataires par le Sang» un mouvement armé dirigé par l’Algérien Moctar Belmoctar.

Le petit jeu de ces alliances, probablement circonstancielles, s’est poursuivi par une nouvelle «association» avec «Al Mourabitoun» un groupe sous la direction d’Abou Walid Sahraoui, qui a revendiqué le dernier attentat perpétré au Niger.

Toutefois, face à la thèse d’une installation de l’EI au Sahel par l’intermédiaire du Mujao, défendue par plusieurs analystes relayés par des organes occidentaux, l’ancien DG de l’AMI, reste très prudent.

Il rappelle d’abord la naturelle originelle du Mujao, «qui était au départ un mouvement de ressortissants arabes de Gao – généralement des trafiquants drogue, animés par la volonté de se protéger des exactions du Mouvement de libération de l’Azawad (MLNA).

Ainsi, pendant l’occupation ils se sont coalisés avec AQMI pour chasser le mouvement touareg de Gao. Cependant, actuellement, il faut noter que le Mujao n’existe plus sous sa forme originelle.

Pour sa part, Abou Walid Sahraoui, dont le groupuscule, Mourabitoune, est à l’origine de l’attaque d’un célèbre complexe gazier algérien en janvier 2013, et plus récemment, de attaques au Burkina Faso et au Niger, proclame sa fidélité à l’Etat Islamique.

Quant à Belmoctar et les autres chefs qui écument encore le vaste espace sahélien, ils restent des alliés fidèles à AQMI».

D’où les énormes difficultés à dégager une lecture claire de la réalité des alliances entre les entités terroristes sous-régionales et internationales.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 21/10/2016 à 14h07, mis à jour le 21/10/2016 à 14h11