Cette évolution comporte aussi une dimension de repositionnement stratégique face à l’Etat Islamique dans la région.
Cette grille d’analyse à niveaux multiples est proposée par des observateurs mauritaniens. Ils expliquent pourquoi Ansar Dine d’Iyad Ag Ghaly, Al Mouarabitoune de Moktar Bel Moktar et une bande d’Al Qaida au Maghreb Islamique(AQMI), ont fusionné pour donner naissance à une nouvelle une entité djihadiste qui prend le nom «Nosrat Al Islam Wal Mouslimine –les défenseurs de l’Islam et des musulmans».
Isselmou Ould Salihi, journaliste, observateur du phénomène islamiste violent depuis une quinzaine d’années, décrypte une décision dont l'origine est selon lui à rechercher dans l’évolution de la situation politique et sécuritaire au Mali «caractérisée par la mise en œuvre de l’accord de paix.
Une nouvelle donne qui devrait permettre un apaisement des rapports entre le pouvoir de Bamako et la rébellion touarègue. L’objectif des mouvements terroristes est de limiter, voire d'annuler les effets bénéfiques attendus de la mise en chantier du processus de paix dans le Nord Mali».
Le même analyste note également une volonté des groupuscules signataires du pacte «d’anticiper, pour faire face à la création d’une force commune aux pays du G5 Sahel, combinée à une montée en puissance des actions de la Mission de l’Organisation des Nations unies au Mali (MINUSMA) et une intensification des patrouilles de Barkhane.
Par ailleurs, la nouvelle entité semble afficher aussi une ferme volonté de marquer son territoire -le Sahel- face à l’hégémonie de Daech, pour contester son leadership à travers des actions spectaculaires et violentes».
Le Groupe 5 du Sahel regroupe le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Moussa Ould Hamed, ancien directeur général de l’Agence Mauritanienne (AMI), régulièrement sollicité dans le cadre de l’animation des forums internationaux sur la sécurité au Sahel, explique que «les groupuscules djihadistes prennent ainsi une longueur d’avance sur les états, notamment le G5 dont la coordination des actions militaires et sécuritaires reste encore au niveau des bonnes intentions.
Cette annonce laisse aussi croire que les différents groupes conservent une réelle faculté de déplacement et une capacité de nuisance certaine, malgré les coups portés par l’opération «Serval» devenu Barkhane depuis quelques années».
En effet, dans le timing, on note une coïncidence troublante entre le retour de l’Etat malien au Nord, à travers la désignation des nouvelles autorités à Kidal et Gao et l’annonce de la fusion des mouvements terroristes. Il s’agit d’une tentative d’adaptation à un nouveau contexte de la part de groupes dont toute l’activité est axée sur une économie criminelle.