Perspectives économiques en Afrique: seule une dizaine de pays échappe à la récession, selon le FMI

DR

Le 14/10/2020 à 11h52, mis à jour le 14/10/2020 à 12h29

L’Afrique va enregistrer sa première récession économique depuis 25 ans. Sur les 54 pays du continent, une douzaine seulement devrait enregistrer une croissance positive en 2020 (voir graphique). La pandémie de Covid-19 est la principale cause de ces récessions.

L’Afrique va connaître sa première récession depuis 25 ans. En effet, selon les projections du Fonds monétaire international (FMI), le continent devrait enregistrer une récession autour de -3% en 2020 à cause de la pandémie du coronavirus. Les pays dont les économies reposent les matières premières telles que le pétrole et/ou dont certains secteurs stratégiques sont particulièrement impactés par les effets de la pandémie (tourisme notamment) sont les plus affectés.

Ainsi, sur les 54 économies africaines, une douzaine seulement devrait enregistrer un taux de croissance positif en 2020. Toutes les autres devraient entrer en récession.

Ainsi, parmi les pays qui accuseront les récessions les plus significatives, le FMI mentionne, dans son dernier rapport sur les «Perspectives de l’économie mondiale», publié le mardi 13 octobre 2020, l'île Maurice (-14,2%), les Seychelles (-13,8%), le Zimbabwe (-10,4%), le Botswana (-9,6%), le Soudan (-8,4%), l’Afrique du Sud (-8,0%), le Maroc (-7,0%), la Tunisie (-7,0%), le Congo (7%) et l’Algérie (-5,5%).

Les plus fortes récessions et les taux de croissance les plus élevés en Afrique, selon les prévisions du FMI.

Maurice, Seychelles et le Botswana qui sont des modèles de bonne gouvernance en Afrique sont particulièrement touchés par les effets de la pandémie du Covid-19 sur leurs économies qui reposent en grande partie sur le tourisme. A titre d’exemple, pour Maurice qui devrait enregistrer la plus forte récession du continent, le tourisme représente 24% du PIB, 131.000 emplois pour une population d’environ 1,3 million d’habitants. 

Pour le Soudan, la récession s’explique par la situation économique héritée de l’ancien régime, les effets de la pandémie du Covid-19 et le confinement de la population qui s’en est suivi.

L’Afrique du Sud, l’économie la plus industrialisée du continent, va enregistrer une forte récession de -8,0%, soit un niveau légèrement inférieur à celui projeté par la Banque centrale sud-africaine (-8,2%). Le pays était déjà entré en récession en 2019 et traverse une crise économique aiguë à cause de la décennie catastrophique de l’ancien président Jacob Zuma. La pandémie du Covid-19 est venue aggraver la situation économique du pays qui s'avère être le plus touché par la pandémie avec 693 359 cas confirmés et 17.863 décès. Le confinement total prolongé et l’impact de la pandémie sur la demande mondiale de matières premières ont impacté négativement l’économie sud-africaine.

Le Maroc aussi est durement touché par les effets du confinement prolongé. La pandémie a particulièrement frappé le secteur stratégique du tourisme. Le Maroc est aujourd’hui l’un des rares pays africains dont les frontières sont encore fermées. Toutefois, en 2021, le Royaume devrait afficher l’une des plus fortes reprises économiques au niveau du continent avec un PIB en croissance de 5%.

La Tunisie qui traverse une situation économique difficile depuis une décennie devrait voir son économie enregistrer une récession de -7,0%. Le pays a été l’un des premiers pays du continent à mettre en place le confinement et à fermer ses frontières extérieures, mettant à l’arrêt son économie et notamment le tourisme.

L’Algérie devrait enregistrer une récession de -5,5% en 2020. La baisse mondiale de la demande en pétrole a entraîné la chute du cours du baril de l’or noir. Or, le pétrole représente plus de 95% des recettes d’exportation et 60% des recettes budgétaires du pays. Le pays devrait renouer avec la croissance en 2021 avec un PIB en hausse de 3,2%.

D’autres pays africains devraient aussi connaître des récessions, dont le Congo (-7 ,0%), Nigeria (-4,3%), l’Angola (-4%), etc.

A noter qu’en dépit d’une conjoncture mondiale difficile, quelques pays africains verront leur PIB croître. La palme de la croissance sera le fait du Soudan du Sud qui devrait enregistrer une croissance de 4,1%, fruit d’une paix retrouvée et de la reprise de la production pétrolière.

Parmi les grands pays du continent, c’est l’Egypte dont l’économie devrait croître de 3,5% en 2020 qui enregistrera la seule croissance positive au niveau de la région Moyen-Orient Afrique du Nord (MENA). Cette performance, le pays la doit notamment aux impacts des découvertes de gaz en Méditerranée, dont la production augmente sensiblement, et aux investissements publics dans les infrastructures. Toutefois, aussi surprenant que cela puisse paraître le FMI prévoit un ralentissement de la croissance égyptienne avec un PIB en hausse de seulement 2,8% en 2021, alors que le pays était sur un trend positif avec une croissance dépassant les 5% (5,6% en 2019).

De plus, si la pandémie est circonscrite en 2020, le pays devrait voir ses principaux leviers de croissance évoluer positivement, à savoir le tourisme, les transferts de la diaspora, les exportations, les IDE, etc.

Outre l’Egypte, les pays d’Afrique subsaharienne qui avaient l’habitude de réaliser des taux de croissance supérieurs à 6% durant ces dernières années vont réaliser des croissances positives, mais relativement faibles. C’est le cas notamment du Bénin (2%), l’Ethiopie (+1,9%), la Tanzanie (+1,9%), la Côte d’Ivoire (+1,8%) et le Kenya (1%). Il s'agit de pays dont les économies reposent plus sur l'agriculture que le pétrole et les matières premières. 

La reprise sera globalement au rendez-vous en 2021 pour prsque tous les pays du continent.

Des reprises se font jour suite aux déconfinements. Et le FMI projette une récession moins profonde que lors de la prévision de juin dernier avec un second trimestre catastrophique dans de nombreux pays.

La reprise rapide de la seconde économie mondiale (La Chine) et les mesures fiscales, monétaires et économiques prises par les pays pour relancer leurs économies ont permis d’atténuer les impacts négatifs de la pandémie et contribué à la reprise qui est perceptible dans de nombreux pays.

Toutefois, selon Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international, pour pallier les dégâts économiques de la pandémie de Covid-19, les pays africains auraient besoin d’environ 1.200 milliards de dollars supplémentaires.

Une chose est sûre, la pandémie devrait pousser de nombreux pays africains à revoir leurs modèles de développement en diversifiant leur économie, en mettant l'accent sur la transformation locale, le développement de leurs marchés intérieurs, et l’amélioration de l’intégration économique du continent.

Par Moussa Diop
Le 14/10/2020 à 11h52, mis à jour le 14/10/2020 à 12h29