Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, s’est entretenu au téléphone lundi matin avec son homologue sénégalais, Macky Sall, selon une nouvelle rapportée par l’Agence Mauritanienne d’Information (AMI), un organe du gouvernement.
Sans fournir d’indication sur l'identité de celui qui a pris l’initiative d’appeler son collègue, la même source précise «qu’au cours de cette communication téléphonique, les entretiens ont porté sur les relations fraternelles existant entre les deux pays frères et les voies et moyens appropriés pour les renforcer et les développer, ainsi que sur les questions d’intérêt commun».
Au-delà de la langue de bois habituelle, les rapports entre Dakar et Nouakchott sont qualifiés «de froids» depuis quelques années par de nombreux observateurs.
Une analyse systématiquement démentie par les officiels des deux pays, en dépit de certains signaux plutôt troublants, tels que le non-renouvellement des licences consenties par la Mauritanie aux pêcheurs artisanaux sénégalais, pour «une divergence liée à la question du débarquement des captures».
Rapporté au contexte régional et international, les entretiens par téléphone entre le président Sall et son homologue mauritanien interviennent à quelques jours de la tenue à Dakar, les 2 et 3 février 2018, d’un sommet «sur le partenariat mondial pour l’éducation» en présence du chef de l’Etat français, Emmanuel Macron, de nombreux autres leaders africains, du président de la Banque Mondiale (BM), et éventuellement du SG des Nations Unies (ONU).
Le président Macky Sall aurait-il pris l’initiative d’inviter son collègue à cette rencontre et d’insister pour qu’il soit effectivement présent cette fois, après avoir constaté que le leader mauritanien a «séché» les manifestations les plus récentes organisées à Dakar, notamment l’inauguration de l’Aéroport International Blaise Diagne (AIBD)?
Mais au-delà de cette première hypothèse, les relations entre la Mauritanie et le Sénégal sont inextricablement imbriquées avec de nombreux dossiers d’intérêt commun, imposant un millier de raisons pour une concertation permanente.
Il y a le dossier de l’exploitation commune d’un gisement de gaz naturel de classe mondiale, découvert à la frontière maritime entre les deux pays au cours des dernières années, vers laquelle poussent les entreprises occidentales partenaires. Une affaire dont la finalisation rencontrerait «quelques blocages, même si on a la certitude que toutes les divergences seront aplanies dans l’intérêt des Etats, qui ont besoin des retombées attendues de ces nouvelles ressources naturelles», confesse un analyste.
Dans les rapports entre Nouakchott et Dakar, on doit aussi évoquer le dossier du non-renouvellement des licences au profit des pêcheurs artisanaux sénégalais, tous originaires de la ville de Saint-Louis. Ces derniers continuent à faire «pression» sur le gouvernement pour renouer le fil des négociations avec Nouakchott, au moment où le président Macky Sall file tout droit vers une échéance électorale prévue en 2019.
Par ailleurs, historiquement, le bétail mauritanien transhume toujours vers les prairies plus vertes du Sénégal pendant la période de soudure (de février à juillet). A cette tradition, s’ajoute une terrible année de sécheresse, imputable au déficit pluviométrique de l’hivernage 2017, qui menace les animaux et les humains dans la Mauritanie des profondeurs, dont le cheptel représente l’unique source de revenus et de vie.
Autant de raisons qui doivent pousser Nouakchott et Dakar à taire les querelles puériles, nées des petites susceptibilités, pour aller dans le sens des intérêts des populations, dans le respect de la souveraineté de chaque Etat.