La SNIM a transcendé la crise. Le patron de la société minière mauritanenne a tenu ces propos dans un entretien diffusé à travers l’émission «Confidential» de la chaîne de télévision panafricaine «Africa 24». Pour rappel, la SNIM, la plus importante entreprise mauritanienne, qui expote du minerai de fer, est confrontée depuis plus de 2 ans à un retournement de conjoncture suite à une plongée des cours mondiaux du fer. Un net contraste avec les belles années pendant lesquelles les cours sont passés de 72 dollars/tonne (en 2009) à un pic de 195 dollars/tonne (2011).
Cependant, pour le premier responsable de l’entreprise, aux commandes depuis avril 2016, celle-ci «a surmonté la crise grâce à une stratégie mise en œuvre pour la redynamiser depuis cette date». Entre autres mesures entreprises figurent la réduction des dépenses, le maintien du niveau de la production tout en conservant le personnel existant et l’ensemble de ses droits.
Un optimisme qui n’est pas partagé par tout le monde. Difficile de redresser la barre d’une entreprise lourdement affectée par la conjoncture en l’espace de 3 mois ! D’ailleurs, lui même reconnaît que la situation n’est pas encore totalement maîtrisée en soutenant travailler «pour dépasser ce stade critique à l’image de toutes les grandes minières à travers le monde», tout en épinglant la gestion du passé à travers quelques mots soigneusement enveloppés dans la langue de bois.
Pour rappel, la SNIM a été dirigée pendant plus de 5 ans par Mohamed Abdallahi Ould Oudaa, devenu ministre de l’Hydraulique et de l’assainissement à la faveur d’un remaniement gouvernemental opéré en avril dernier.
Du côté de l’opposition, on reste plutôt sceptique par rapport au discours optimiste de l’actuel ADG de la SNIM. Ainsi, Lô Gourmo Abdoul, vice-président de l’Union des forces de progrès (UFP), estime «que même si des mesures de redressement d’urgence pourraient sauver ce qui reste encore de la SNIM, après la dérive de gestion de ces dernières années, qui l’ont transformée en vache à lait pour les troupeaux d’éléphants blancs du régime, la question de fond reste entière».
«Ces dérives de gestion» ont été dénoncées à plusieurs reprises par le Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), un vaste rassemblement de l’opposition, en ces termes «des centaines de milliards d’ouguiyas dilapidés à travers des projets populistes, systématiquement surfacturés, souvent sans rapport avec l’objet de la société, à l’image de ce prêt de 15 milliards d’ouguiya consenti en faveur d’une entreprise privée chargée du projet de construction du nouvel aéroport de Nouakchott, achats d’avions de seconde main au profit de la compagnie aérienne Mauritanie airlines international (MAI), implication dans la réalisation d’une usine de fabrique de poteaux, construction controversée d’un siège à Nouakchott, etc.
Pour maître Lô, la question existentielle est plutôt liée au mode d’exploitation. «Celui-ci est entièrement basé sur l’exploitation du produit brut, le fer. Un modèle qui dure depuis 50 ans et qui fonde notre dépendance néocoloniale vis-à-vis des importateurs et de leurs industries de transformation».
Ce qui ramène au cœur du débat la question de la transformation d’une économie fortement exposée aux chocs extérieurs. Et sans des produits à forte valeur ajoutée, le pays continuera à dépendre de la fluctuation des cours mondiaux du fer.
L’intérêt d’un tel débat est mille fois justifié par le statut de la compagnie, dont le capital est détenu à 78% par l’Etat et qui occupe le rang de deuxième employeur du pays, après la fonction publique.