Mauritanie: le parti islamiste relance le débat sur le prix du carburant à la pompe

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Le 04/01/2017 à 15h45, mis à jour le 04/01/2017 à 16h45

En dépit de la baisse des cours du pétrole, les Mauritaniens n’ont pas bénéficié de baisses des prix à la pompe à l’instar de tous les pays avoisinants. Une situation dénoncée par le Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD-Tawassoul) lors du Conseil national dce sa "Choura".

Le Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD-Tawassoul), un parti de la mouvance islamiste modérée, relance le débat au sujet du prix du carburant à la pompe en Mauritanie.

Cette formation de l’opposition «exige du gouvernement de prendre toutes les mesures pour la protection du pouvoir d’achat des citoyens et lutter contre la hausse vertigineuse des prix. Elle vise en particulier le prix du carburant, resté élevé malgré la baisse du coût du baril de pétrole sur le marché international», selon une déclaration publiée au terme d’un Conseil national de la «Choura».

En effet, malgré une chute des cours internationaux du pétrole liée à diverses raisons au cours des dernières années, avec un niveau plancher de 30 dollars, les prix du carburant à la pompe en Mauritanie n'ont pas connu de baisse, même pas une seule fois, contrairement aux autres pays de la région.

Le prix de l’essence à la pompe est de 436,6 ouguiyas le litre, soit environ 1,4 dollar et celui du gasoil est de 390 ouguiyas, soit 1,24 dollar, en ce mois de janvier 2016, soit l’un des plus chers de la sous-région.

Mauritanie: pénurie de carburant dans les stations

Ainsi, le consommateur mauritanien n’a pas bénéficié des effets positifs de cette conjoncture mondiale. Une situation qui explique la naissance d’un mouvement contestataire fondé par des jeunes «Mani Chari Gasoil» (Je n'acheterai plus du gasoil) qui symbolise littéralement le refus d’acheter du carburant au prix fixé par les autorités.

Pour sa part, le gouvernement explique le maintien du prix des hydrocarbures à la pompe à leur niveau actuel par le fait que la Mauritanie «souffre de la chute des cours mondiaux du minerai de fer, qui procure plus d’un tiers des recettes budgétaires». Ensuite, les pouvoirs publics ayant longtemps subventionné le prix des hydrocarbures à la pompe à raison de 85 ouguiyas le litre, et cela pendant plusieurs années, l’Etat ne souhaite plus revenir sur cette situation en cas de retournement des cours du baril et donc préfère maintenir le prix à un niveau stable, et ce d’autant qu’il consent actuellement une subvention en faveur de la butane qui engloutit annuellement 7 milliards d’ouguiyas.

LES SYNDICALISTES EXIGENT LA BAISSE DU PRIX DU CARBURANT À LA POMPE

Plusieurs arguments sont avancés par certains économistes. «Dans une économie comme la nôtre, où l’effet de transmission est moins significatif, par manque de dynamisme, qui en plus est secouée par la chute des prix du fer sur le marché international, il n’est pas évident de connaître une baisse du coût du carburant à la pompe aussitôt que les prix chutent au niveau international», explique l’un d’eux à le360 Afrique.

Une opinion très remontée contre le gouvernement

Une explication qui ne semble pas convaincre une opinion très remontée contre les autorités par rapport à la gestion du dossier des hydrocarbures à la pompe. Illustration avec ces éléments tirés d’une édition de l’hebdomadaire «Le Calame» dénonçant l’attitude du gouvernement. Selon l’hebdomadaire qui explique «l’ampleur de l’arnaque», «sur les 384 ouguiyas que vous payez à la pompe pour un litre de gasoil, l’Etat prélève 242 ouguiyas rien que pour lui. Les 142 ouguiyas restants sont répartis entre fournisseurs, sociétés pétrolières, frais de transit et de dépôt, marge des distributeurs, impôts (IMF, TVA, BIC),…».

Mieux encore, avec la plus récente structuration des prix, la marge de l’Etat est passée à 255 ouguiyas, ce qui accroît davantage ses recettes tirées des hydrocarbures et lui permet d’atténuer l’impact de la baisse des recettes budgétaires tirées des mines et du pétrole.

Ainsi, au lieu de répercuter la baisse du prix du baril au profit du consommateur, l’Etat préfère engranger les recettes pour combler la baisse des ressources budgétaires. Ainsi, d’après l’hebdomadaire, «plus de 140 milliards d’ouguiyas sont ainsi rentrés dans ses caisses en 2015». Et avec les hausses enregistrées suite à la restructuration des prix en 2016, les recettes de l’Etat tirées des hydrocarbures devront augmenter en 2016.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 04/01/2017 à 15h45, mis à jour le 04/01/2017 à 16h45