Fortement critiqué et même vilipendé pour sa volonté supposée de modification des règles constitutionnelles en vue de s’offrir un troisième mandat, le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, s’est clairement prononcé contre une telle option, jeudi.
S’exprimant jeudi soir sous une tente, -devant une assistance composée de plusieurs milliers de personnes réunies au Centre international des conférences de Nouakchott (CICN), à l’occasion de la cérémonie de clôture du "Dialogue national inclusif", lancé le 29 septembre dernier, le premier Magistrat de Mauritanie a affirmé «que l’idée d’un troisième mandat ne lui est jamais venue à l’esprit. Cette question n’existe que dans la tête de ceux qui l’ont posée».
Faisant allusion à son parcours, marqué par l’organisation réussie de deux putschs militaires en 2005 et 2008, le chef de l’Etat mauritanien a laissé entendre en termes voilés qu’il aurait pu entreprendre une nouvelle aventure contre la constitution «juste dans son intérêt personnel». Cependant, il estime que «l’intérêt supérieur de la Mauritanie exige le respect des dispositions constitutionnelles et du principe de l’alternance dans l’exercice du pouvoir».
Avec cette déclaration officielle, qui intervient un peu tardivement, en ce sens que cette affirmation était la principale raison du boycott de l’opposition radicale, le président souhaite désormais clore le chapitre relatif au 3e mandat dont il a pourtant beaucoup contribué à entretenir le flou.
En effet, à quelques jours du lancement du dialogue national inclusif, des personnalités issues des rangs de l’Union pour la république (UPR), le parti du président, ont multiplié les propositions relatives à l’amendement de la constitution et portant notamment sur la suppression de l’article 28 de la constitution de 1991 révisée par voie référendaire le 19 juin 2006. Une réforme défendue même avec un peu de zèle par le porte-parole du gouvernement, Mohamed Lemine Ould Cheikh, sans pour autant que l’homme fort de la Mauritanie n’intervienne pour démentir toute velléité de modification de l’article 28 de la constitution.
Toutefois, après l’opposition radicale, la société civile et une grande partie de l’opinion nationale, même une partie de l’opposition dite modérée qui participe au dialogue a fini par afficher clairement son opposition à toute discussion relative au 3e mandat. Du coup, cette modification de l’article 28 a été finalement écartée des résolutions pour «préserver le consensus» au sein des dialoguistes, notamment après le retrait du dialogue de l’Alliance populaire progressiste (APP), le parti du vieux leader Messaoud Ould Boulkheir, président du Conseil économique et social, ex-président de l’Assemblée nationale que beaucoup pourtant avait fini par ranger dans le camp des soutiens de Ould Abdel Aziz.
Du coup, face à cette clarification, les commentaires divergent. De nombreux Mauritaniens pensent qu’avec le dialogue, Ould Abdel Aziz a surtout voulu prendre le pouls des Mauritaniens sur un hypothétique 3e mandat. Il s’est avéré que l’écrasante majorité s’y oppose de manière radicale. Et selon certaines sources, même au niveau de la grande muette, le 3e mandat ne faisait pas l’unanimité.
Ayant tiré la bonne conclusion, Ould Abdel Aziz, en tant que fin stratège, renonce «définitivement» à un 3e mandat. Une chose est toutefois certaine, il ne quittera pas le palais sans bien évidemment préparer sa succession. Optera t-il pour une sortie à la Poutine ou jouera-t-il le jeu démocratique en laissant le peuple mauritanien choisir pour une première fois, librement, sans interférence des militaires, son destin? L’avenir de la Mauritanie y dépend. En attendant, les prétendants peuvent retrousser leurs manches, ….