Mauritanie: la drôle de trouvaille de Ould Abdel Aziz

Mohamed ould Abdelaziz, président de la Mauritanie.

Mohamed ould Abdelaziz, président de la Mauritanie. . DR

Le 23/12/2016 à 15h22, mis à jour le 23/12/2016 à 16h55

Partira ou partira pas? A cette question que se posent bien des Mauritaniens, le président Ould Abdel Aziz a répondu avec fermeté que non. Cependant, hier jeudi 22 décembre, il a rencontré des personnalités politiques et leur a fait la confidence qu'il allait créer un nouveau parti.

Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, est soumis à la dure réalité de la limitation des mandats successifs à la tête de l'Etat en vertu des articles 28 et 99 de la Constitution de juillet 1991, révisés par voie référendaire le 19 juin 2006. D'après son entourage et mais aussi selon ses propres déclarations, l’homme est déterminé à respecter «cette ligne rouge». Une option affirmée et réitérée en plusieurs circonstances, notamment à l’occasion de la clôture des assises du Dialogue national inclusif de septembre-octobre 2016. 

Mais au-delà de cette retraite imposée par la loi fondamentale, l’ex officier général, commandant en chef du redoutable Bataillon de Sécurité Présidentielle (BASEP), arrivé au pouvoir à la faveur du putsch « rectificatif » du 06 août 2008 et présumé cerveau du coup d’état du 03 août 2005, qui a troqué la vareuse contre un impeccable costume 3 pièces, semble avoir attrapé le virus de la politique.

Ainsi, il envisage la création d’un nouveau parti politique, en dehors de l’Union Pour la République (UPR), principale formation de la majorité.

Celle-ci a été fondée dans la foulée de la fièvre de «la rectification». Elle a largement contribué à la victoire lors du scrutin présidentiel du 18 juillet 2009. Mais cette formation ne serait plus «performante» au goût du locataire du palais de la République. Ainsi, recevant les sénateurs cette semaine, Mohamed Ould Abdel Aziz a mis les pieds dans le plat en annonçant son intention de créer un nouveau parti politique.

Parmi le flot de confidences sorties de la rencontre entre le président de la République et les sages de la chambre haute, destinée à une mise à mort programmée dans le cadre d’une série de réformes constitutionnelles, une source bien informée confie à le360 Afrique que «le président entend fonder une formation solide capable de survivre et d’influencer le destin national au-delà de l’échéance de 2019».

Se montrant encore plus direct, Mohamed Ould Abdel Aziz a rappelé à ses interlocuteurs «le triste sort» du Parti républicain social et démocratique (PRDS), nauvragé le jour du renversement de Maaouya Ould Sid’Ahmed, et le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD-ADIL), entré dans un profond coma après le départ du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi.

Par ailleurs, un analyste politique rappelle que pendant la bataille pour la réélection de Ould Abdel Aziz en juin 2014, les hommes qui avaient conduit la campagne présidentielle, à l’image du directeur, Sidi Salem, actuel membre du gouvernement, et de bien d’autres, n'étaient pas issus du sérail de l’UPR. Ce qui est plutôt un signe du manque de confiance vis-à-vis de cette formation, accusée de ne pas défendre efficacement le boss Aziz face aux attaques de plus en plus incisives de l’opposition.

Mais par rapport à ce projet de création «d’un nouveau parti, duquel émergerait un homme prédestiné à exercer le pouvoir par procuration», en l'occurrence Moussa Ould Hamed, ex DG de l’Agence Mauritanienne d’Information (Ami-organe gouvernemental), rappelle qu’il s’agit «d’une formule qui a montré ses limites ailleurs. La potiche saura toujours trouver les moyens de son émancipation pour exercer la plénitude des prérogatives attachées au pouvoir».

Illustration notamment avec le cas du Benin «le président Yayi Boni, qui était présenté comme un homme politique pure fabrication de Nicéphore Soglo, a pris rapidement ses distances pour imprimer sa marque à la conduite des affaires publiques, bien loin des avis et recommandations de son mentor».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 23/12/2016 à 15h22, mis à jour le 23/12/2016 à 16h55