Mauritanie: bisbilles au sein du parti au pouvoir

Mohamed ould Abdel Aziz, président de la République islamique de Mauritanie.

Mohamed ould Abdel Aziz, président de la République islamique de Mauritanie. . DR

Le 15/02/2018 à 12h32, mis à jour le 15/02/2018 à 12h55

La majorité présidentielle en Mauritanie est plongée dans une "guerre" à coups de petites phrases assassines entre certains membres du gouvernement et des responsables de l'Union pour la république (UPR), principal parti de la mouvance.

Larvée depuis plusieurs semaines, la "guéguerre" qui oppose les différentes branches de la majorité présidentielle s'est aggravée ces dernières heures.

Depuis quelques mois, certains membres du gouvernement boycottent systématiquement toutes les propositions de l’Union pour la république (UPR), principal parti de la majorité. Rappelons que l’UPR est né dans la foulée du coup d’Etat du 6 août 2008 qui a placé le général Mohamed Ould Abdel Aziz à la tête du pays, dans l’objectif de soutenir le mouvement de «la rectification» et faire de son auteur le nouveau président de la République.

Un objectif atteint à la faveur de l’élection présidentielle du 18 juillet 2009, marquant le retour de la Mauritanie à l’ordre constitutionnel et qui a conféré à la prise de pouvoir une légalité. 

L'aggravation du conflit au sein de la majorité s'est illustrée par un tweet en langue arabe de Moctar Ould Diaye, ministre de l’Economie et des finances, considéré comme l'un des hommes clés du chef de l’Etat: «L’Union pour la République a échoué en se montrant incapable de sensibiliser les couches les plus larges de la population sur les nombreuses et immenses réalisations» du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

Il fait référence aux progrès réalisés ces dix dernières années: promotion de la démocratie et de l’Etat, hausse constante du PIB ou réalisation de nombreux programmes en faveur des couches les plus vulnérables, précise un haut cadre du département de l’économie et des finances.

Ce procès de l’UPR, de la part d’un responsable gouvernemental, renvoie au souvenir du très agité référendum constitutionnel du 5 août 2017, à l’occasion duquel le parti a été complètement écarté au profit de l’administration. Cette consultation populaire boycottée par l’opposition, qui n'avait pas été autorisée à faire campagne, s’est soldée par un taux de participation plutôt mitigé d’environ 53%, selon les sources officielles. Un chiffre officiel contesté par le G8, vaste rassemblement de l'opposition, qui a dénoncé «la fraude et le bourrage des urnes» à l’occasion de ce vote.

Autre évènement de cette «guéguerre» de moins en moins feutrée: la sortie sur les réseaux sociaux du président de l’UPR, maître Sidi Mohamed Ould Maham, député à l’Assemblée nationale, critiquant une décision récente du gouvernement qui maintient en activité quelques hauts fonctionnaires en dépit de la limite d’âge autorisée.

Une position critiquée par certains cadres de la mouvance, à l’image de Cheikh Sidi Mohamed Ould Maye, directeur général adjoint de l’Agence mauritanienne d’informations (AMI), qui estime que le président de l'UPR «a oublié son devoir de réserve en critiquant une décision prise par le président de la République».

Pour sa part, Moussa Ould Hamed, analyste politique et ex-directeur général de cette même agence, estime que «toute cette agitation est à mettre au compte d’une guerre de position entre le Premier ministre, Yahya Ould Hademine et le président de l’UPR, dans un contexte de flottement et d’incertitude en perspective de l’élection présidentielle de 2019».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 15/02/2018 à 12h32, mis à jour le 15/02/2018 à 12h55