Sénégal: la hausse de la taxe sur le ciment inquiète les consommateurs

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Le 06/01/2017 à 19h24, mis à jour le 07/01/2017 à 09h00

Durant l'année 2016, le secteur des matériaux de construction a connu une croissance de près de 10%. Mais l'Etat, voulant profiter de la manne, a augmenté la taxe sur le ciment de 5 euros/tonnes en 2017. Les consommateurs s'inquiètent déjà de cette nouvelle donne.

Au titre de l’année 2016, une hausse de 9,8% a été enregistrée dans l’activité du secteur des matériaux de construction. Cette progression qui n’est pas près de s’estomper, est due à la réalisation de nouvelles infrastructures comme les autoroutes Mbour-Diamniadio (90 km) et Ila Touba (250 km), la nouvelle route Kaolack-Fatick (50 km) et plusieurs autres voies de communication terrestres dans le cadre de la coopération avec les Etats-Unis sous l'initiative du Millenium Challenge. La forte demande en ciment, en rond à béton, fait que les producteurs ne ressentent plus la concurrence. En effet, Sococim et Ciments du Sahel, les deux premiers installés voyaient d'un très mauvais oeil l'arrivée de Dangote. Mais visiblement, la poursuite de la croissance dans le secteur atténue la tension entre ces trois concurrents. 

A leur grand bonheur, même avec l'augmentation des prix du ciment en ce début d'année 2017, les ventes ne risquent pas de s'effondrer. C'est cependant une hausse des prix qui se fait au détriment des commerçants, des professionnels du bâtiment et des particuliers, cette hausse des prix des matériaux de construction n'est près de s’arrêter.

Pour l’heure, les producteurs pointent du doigt l’Etat qui, conformément à la loi de finances 2017, disent-ils, «a appliqué une taxe de 3 francs CFA sur chaque kilogramme de ciment. On enregistre ainsi une augmentation de 3000 francs CFA (5 euros) sur la tonne». Cette mesure fiscale est applicable aux trois cimenteries que compte le Sénégal.

Inquiétude des consommateurs

Momar Ndao, président de l’Association de défense des consommateurs du Sénégal (ASCOSEN) est ainsi monté au créneau pour plaider sa cause. Beaucoup de commerçants fustigent également les mesures prises par l’Etat. C’est le cas de Cheikh Tidiane Sy, un distributeur de matériaux de construction à Pikine dans la banlieue populeuse de Dakar. «L'application de cette nouvelle taxe ne fait pas nos affaires. La tonne de ciment coûtait 59.000 FCFA, aujourd'hui il est à 62.000. Les clients ne le comprennent pas et cela peut réduire nos ventes ou notre marge». En effet, ces nombreux gérants de quincaillerie ont l'habitude d'encaisser des commandes à l'avance auprès de salariés qui s'adonnent à l'autoconstruction. Peu d'entre eux avaient anticipé cette hausse. Il s’insurge également contre ce qu'il appelle la spéculation dont certains cimentiers sont à l’origine et qui n'est en somme que la répercussion de la taxe. 

Un autre distributeur, Amdy Seck, trouvé dans la même localité donne quant à lui, un avis contraire. Il ne s’inquiète pas outre mesure de cette hausse de la taxe appliquée au ciment. «La demande est tellement forte que les acheteurs sont contraints d'acheter le ciment, peu en importe le prix». Soutient-il. Tout de même, «la stabilisation des prix incombe à l’Etat, il devrait s’y activer», termine-t-il.

Le constat est le même partout. Ndeye Fatou, une commerçante soutient, que «malgré que nous soyons au fait des mesures prises par l’Etat en haussant la taxe appliquée au ciment, nous restons sereins. Car nous fournissons de grandes entreprises. Nos clients reviennent toujours vers nous".

Baisse d'activité des entreprises du BTP

Quant aux maçons et aux entreprises du bâtiment, ils ont du mal à cacher leurs inquiétudes. "Ces mesurent vont certainement se ressentir dans notre boulot. On nous confie que de petits chantiers qui auront du mal à terminer à cause de la cherté des matériaux de construction", s'inquiète Thierno, un jeune maçon également dans ce même département de Pikine.

Au final, c’est le consommateur et certains corps de métiers qui vont pâtir de cette hausse qui risque de se faire ressentir dans d’autres secteurs. Notamment au niveau des produits de première nécessité comme l’huile et le sucre. Car au Sénégal, une hausse de prix en entraîne toujours une autre. 

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 06/01/2017 à 19h24, mis à jour le 07/01/2017 à 09h00