Lors d’une visite au khalife général des mourides, ce début de semaine, le président sénégalais a réaffirmé sa décision de libérer Karim Wade. Probablement avant la fin du mois de ramadan. Mais quelle forme va revêtir la libération de Wade-fils ?A priori, plusieurs formules s’offrent à Macky Sall. Il peut accorder une amnistie, une grâce présidentielle ou une liberté conditionnelle à M. Wade. Chacune de ces formules n’est pas sans conséquence pour les finances de Karim Wade. Pour rappel, dans sa décision, confirmée par la Cour Suprême, la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) avait condamné Karim Wade à six ans de prison ferme assortie d’une amende de 138 milliards de FCFA et une confiscation de tous ses biens.En cas d’amnistie, qui doit être votée par l’Assemblée nationale, il n’y a pas d’ambiguïté. «Si Karim Wade est amnistié, il peut recouvrer ses biens, car l’amnistie efface l’infraction. Donc, on estime que les faits n’ont jamais existé», explique un magistrat interrogé par le journal «L’EnQuête».S’il s’agit d’une grâce présidentielle, les spécialistes du droit sont divisés sur la possibilité du condamné à recouvrer ses biens. Pour certains, tout dépend de l’acte de grâce. Celle-ci peut se limiter à la peine pénale et ne pas concerner les autres éléments de la décision de condamnation, à savoir l’amende et la confiscation de biens.Pour d’autres, du point de vue juridique, il n’y a aucun rapport entre la libération de Karim Wade et la décision de la CREI, frappée de l’autorité de la chose jugée.«Une grâce signifie liberté dans la pauvreté, voire même la mort civile», soutient l’avocat Me Amadou Aly Kane. Autrement dit, en cas de grâce, Karim Wade va recouvrer la liberté, mais sa condamnation restera dans son casier judiciaire (ce qui l’empêchera de pouvoir participer à l’élection présidentielle) et l’Etat pourrait toujours lui réclamer l’amende assortie de la condamnation. Même scénario en cas de libération conditionnelle.Ce qui explique, d’après la presse sénégalaise, le refus de Karim Wade d’accepter une grâce présidentielle, réclamant son innocentement.Toutefois, après libération, l’Etat peut renoncer à l’exécution de la décision de justice en ce qui concerne les intérêts civils.Ces considérations judiciaires mises de côtés, Macky Sall cherche aussi le meilleur timing pour «noyer» l’impact médiatique d’une sortie de prison de Karim Wade en le faisant au moment où les populations sont «distraites» par autre chose (une fête religieuse comme la Tabaski ou la Korité, un événement sportif, etc.).Il ne sera pas le seul président du Sénégal à le faire. Wade avait libéré Idrissa Seck le jour d’une demi-finale de CAN que jouait le Sénégal en février 2006. Avant cela, Abdou Diouf avait aussi discrètement libéré, en 1993, le chef religieux Moustapha Sy à la veille de la Korité.
Le 16/06/2016 à 10h56