C’est à travers un communiqué laconique que la présidence de la République sénégalaise a officialisé le limogeage de la présidente de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) et son remplacement par l’ancienne doyenne des juges Seynabou Ndiaye Diakhaté.
Si, pour le pouvoir, officiellement, le mandat de trois ans de Nafi Ngom Keïta est arrivé à terme – un point contesté par le professeur de droit public à la retraite, Jacques-Mariel Nzankeu, pour qui, d’après la loi, le mandat de Mme Keïta court jusqu’en mars 2017 – beaucoup d’observateurs estiment que ce limogeage de Mme Keïta est lié au dernier rapport de l’OFNAC.
Dans ce rapport accablant, publié il y a quelques mois, l’OFNAC met en cause plusieurs proches de Macky Sall, pointant de graves fautes de gestion et des détournements de deniers publics.
Cet épisode, qui a fortement irrité le Palais – le directeur de cabinet du président Sall a publiquement fustigé la démarche de l’OFNAC prenant la partie des personnalités du parti citées dans le rapport – a été le point de rupture entre Mme Keïta et Macky Sall.
Dans la foulée de la publication de ce rapport, la patronne de l’OFNAC avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur Aliou Sall, frère du président Macky Sall et maire de Guédiawaye, pour son rôle dans l’affaire dite PETRITIM et l’installation de la Banque de Dakar (BDK).
Pour rappel, l’opposition et la société civile portent de graves accusations contre Macky Sall dans ces dossiers. Ce que l’intéressé dément. Dans tous les cas, ces deux épisodes semblent avoir acté la «rupture de confiance» entre Macky Sall qui, jusque-là, aurait refusé de recevoir solennellement le rapport de l’OFNAC, et Mme Keïta.
Nommée le 25 juillet 2013, par décret présidentiel, l’ancienne patronne de l’Inspection générale d’Etat (IGE), poste qu’occupait Nafi Ngom Keïta avant sa nomination à la tête de l’OFNAC, dont les rapports heurtés avec le pouvoir se sont fait sentir dès le début, n’a jamais réussi à trouver la bonne formule.
Ainsi, sur les 742 personnalités assujetties à la déclaration de patrimoine, «seules» 385 se sont pliées à l’exercice, d’après la presse sénégalaise.
Le pouvoir reproche notamment à la désormais ex-patronne de l’OFNAC son «manque de réserve» du fait de ses nombreuses sorties publiques dans la presse pour commenter certains dossiers, mais aussi de «se prendre pour le maître des poursuites».
En tout cas, comme le soulignent certains journaux, ce matin, ce dossier de l’OFNAC, s’ajoutant à celui de la CREI, porte un sérieux coup à la volonté maintes fois réaffirmée du pouvoir de lutter contre la corruption et les détournements de deniers publics.