Le clivage s’accentue de jour en jour au Parti socialiste (PS). A ce rythme, c’est à se demander si la formation fondée par Senghor ne s’achemine pas vers une nouvelle scission?
Le feu couvait déjà tant les dissensions étaient nombreuses entre les deux clans (celui d’Ousmane Tanor Dieng, le secrétaire général du parti, et celui de Khalifa Sall, le maire de Dakar) qui se font désormais ouvertement la guerre. Et la récente décision de la direction du parti d’aller aux Législatives de 2017 avec la coalition «Benno Bokk Yakaar», dominée par le parti de Macky Sall, n’a fait qu’aggraver la situation.
En effet, aussitôt pistonné à la tête du nouveau Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), Ousmane Tanor Dieng, soutenu par la direction du PS, a opté pour la poursuite du compagnonnage avec Macky Sall.
Vendredi, au lendemain de la nomination de Tanor, Serigne Mbaye Thiam, un de ses fidèles parmi les fidèles, a annoncé, lors d’une conférence de presse, la décision du PS d’aller aux législatives avec «Benno Bokk Yakaar», expliquant, chiffres à la clé, que les différentes sections et coordinations du parti s’étaient largement prononcées en ce sens. Par conséquent, il invitait tous les militants à respecter «le choix de la majorité».
Mais cette décision ne plait pas à tout le monde au PS. Le Mouvement pour la jeunesse et le socialisme (JDS) était déjà en train de consulter la base, via une pétition, sur le compagnonnage avec «Benno Bokk Yakaar».
Barthélémy Dias, le député-maire de Sacré-Cœur Mermoz et fidèle de Khalifa Sall, estime que le Bureau politique ne peut, en aucun cas, décider pour le parti en vue des législatives. Pis, selon «Barth», les critères de représentativités n’ont même pas été respectés, et que seul le Comité central a cette prérogative. «Le Parti socialiste, à travers sa direction, a décidé de chercher les voies et moyens, dans le cadre de l’escroquerie qu’est «Benno Bokk Yakaar», de donner des gages à Macky Sall pour pouvoir, en échange, avoir des postes et des avantages», fustige Barthélémy Dias, qualifiant la décision d’inadmissible.
Il annonce une plainte pour «faux et usage de faux», qui sera déposée ce mardi, contre le Bureau politique du PS.
Avec le langage fleuri qui est le sien, Dias-fils n’hésite pas à parler de «perroquets de services» (PS) à propos de certains de ses camarades de parti favorables à Ousmane Tanor Dieng et donc à l’alliance avec Macky Sall.
Dans cette guerre par procuration (entre Tanor et Khalifa), le soutien de chaque coordination compte. Pour discréditer la pétition initiée par le JDS, la section de Louga fustige la «léthargie» qui prévaut au sein de la structure pourtant renouvelée depuis un certain temps. Idrissa Diagne, le secrétaire général de la section JDS de Louga, exige ainsi l’organisation d’une conférence extraordinaire pour renouveler le bureau. Faute de quoi, il menace d’initier une procédure pour destituer Mame Bounama Sall, le secrétaire national du JDS, l’accusant de «gestion clanique».
Fondé par Senghor, le PS a dominé de façon écrasante la vie politique du Sénégal avant sa perte du pouvoir après l’alternance de 2000. Celle-ci mettait fin à 40 dans de règne des socialistes. Depuis cette défaite, le PS peine à retrouver son rang, avec des résultats électoraux de plus en plus décevants.
Dans son histoire, le parti a connu plusieurs scissions avec les départs de grandes figures (Djibo Leyti Kâ en 1998, puis Moustapha Niasse en 1999) qui n’ont jamais digéré le choix de Tanor comme secrétaire général du parti suite au fameux «Congrès sans débats» de 1996.
Va-t-on vers une nouvelle scission au PS? Khalifa Sall et Cie écartent cette hypothèse, disant vouloir se battre «à l’intérieur» du parti pour imposer leurs idées. Mais face à l’inamovible «OTD» (Ousmane Tanor Dieng) qui tient solidement l’appareil du parti, le pari est loin d’être gagné.