Djibo Leyti Kâ a rendu l’âme ce jeudi 13 septembre, à la clinique des Madeleines de Dakar. L’annonce du décès de cet homme politique qui aura, en partie, cheminé avec les différents chefs d’Etat sénégalais, a été faite au moment où se tenait l’installation de l’Assemblée nationale, 13ème du genre.
Le défunt président de la Commission nationale pour le dialogue des territoires (Cndt) a, de Léopold Sédar Senghor à Macky Sall, traversé toute l’histoire politique du Sénégal indépendant en étant plus ou moins proche des régimes qui se sont succédés.
Né le 21 février 1948 à Thiarny dans le département de Linguère de la région de Louga au nord-ouest du pays, Djibo Leyti Kâ a fait ses études universitaires à la faculté de sciences juridiques et économiques de l’Université de Dakar, actuelle Université Cheikh Anta. Après son passage à l’Université, il intègre l’Ecore nationale d’Administration de Dakar d'où il sort en 1975.
Djibo, l’homme politique
Une fois diplômé de l’Ena de Dakar, Djibo Kâ est affecté, de 1975 à 1976, à Saint-louis, ancienne capitale du pays et alors deuxième ville, au poste de vice-gouverneur de la région. Ce fils du Djolof se fait remarquer dans l’entourage du président Léopold Sédar Senghor où il a, tour à tour, occupé les postes de Conseiller technique, puis d’adjoint au directeur de cabinet du chef de l’Etat de 1976 à 1977. Poursuivant son ascension, il est promu en 1978, directeur du cabinet du président Senghor, poste qu’il occupera jusqu’en 1980, date de la démission de celui-ci de la magistrature suprême.
Désigné président de la république en 1980, Abdou Diouf nomme Djibo parmi les membres de son gouvernement. De 1981 à 1988, il est ministre de la Communication et assurait parallèlement les fonctions de chargé des relations avec les assemblées. Par la suite, Djibo Kâ dirigera plusieurs départements ministériels dont: le ministère de la Planification et de la coopération, de 1988 à 1990; le ministère de l’Education nationale de 1990 à 1991. Il devient chef de la diplomatie sénégalaise, le 8 avril 1991. Le 1er juin 1993, Djibo est nommé ministre d’Etat, ministre de l’intérieur. Mais en mars 1995, à la suite des différends avec Abdou Diouf, il quitte le gouvernement.
La traversée du désert
Considéré, pendant plusieurs années, comme le numéro 2 du Parti Socialiste (Ps), grâce à sa proximité avec Abdou Diouf, Djibo Kâ a commencé à perdre son aura au sein du parti au pouvoir. Afin de récupérer sa place, il met sur pied, en 1997, le Mouvement du Renouveau qui créera quelques frictions au sein du Parti socialiste. Mais le Comité directeur du Ps, réuni à son siège, et avec l’appui du président Abdou Diouf, estime que le Mouvement doit disparaitre. Très remonté contre Djibo Kâ et 10 de ses partisans, il décide ainsi de les suspendre des activités du parti le 19 novembre 1997. Cette décision du Bureau politique du Parti socialiste va pousser le natif de Thiarny à démissionner en avril 1998.
Pour le sanctionner de la division qu’il a, selon les membres du PS, «tenté de mettre au sein du Parti», le gouvernement lui retire son passeport et l’empêche de quitter le pays. Mais, ironie du sort, ces sanctions vont renforcer Djibo Leyti qui, à partir de 1998, voit sa popularité nationale grandir. Et il en obtient la confirmation aux élections législatives de mai 1998 durant lesquelles il bénéficie de 13% des suffrages validés. Ce pourcentage lui offre ainsi 11 sièges à l’Assemblée nationale. Elu député sous la bannière de l’Union pour le renouveau démocratique (URD), son parti, Djibo Kâ dirigera de juillet 1998 à janvier 2011, le Groupe parlementaire, Démocratie et liberté au parlement.
Djibo plébiscité tour de rôle par Wade et Sall
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C’est avec l’URD que Djibo Kâ ira aux élections présidentielle de février 2000 et obtient 7,1% des voix. Malgré ses déclarations d’avant élection de soutenir Abdoulaye Wade, au cas où celui-ci irait au deuxième tour des présidentielles de 2000, Djibo Kâ finira par se ranger du côté d’Abdou Diouf. Selon la rumeur, ce dernier lui avait promis le poste premier ministre en cas de victoire. Mais, malheureusement pour le leader de l’URD, Abdou Diouf sera battu par Abdoulaye Wade, le 19 mars 2000, au deuxième tour.
Et les électeurs sénégalais lui tournent le dos aux élections législatives de juin 2007 durant lesquelles il ne parvient pas à rééditer son score de mai 1998. Djibo Kâ sera toutefois nommé par le président Abdoulaye Wade ministre d’Etat chargé de l’Economie maritime et du transport maritime international.
A la suite du deuxième tour des élections présidentielles d’avril 2012, et la défaite d’Abdoulaye Wade devant Macky Sall, L’enfant de Linguère perd son portefeuille ministériel. Il ira ainsi seul aux élections législatives de juillet 2012 où il ne réussit à avoir qu’un seul siège de député.
Tel un sphinx qui renaît toujours de ses cendres, Djibo Kâ réussit à être nommé par le président Macky Sall. Ainsi le 21 décembre 2015, il devient président de la Commission nationale pour le dialogue territorial, poste qu’il occupera jusqu’à son décès ce jeudi 14 septembre 2017.