Affaire Nafi Ngom Keïta: la polémique atteint le président de la Cour suprême

Nafi Ngom Keita, ex-patrone de l'Office national de lutte et de fraude contre la corruption (OFNAC).

Nafi Ngom Keita, ex-patrone de l'Office national de lutte et de fraude contre la corruption (OFNAC).. DR

Le 05/08/2016 à 13h57, mis à jour le 05/08/2016 à 14h12

«L’affaire Nafi Ngom Keïta» est peut-être en train de virer à la «Suprême polémique». De manière peut être involontaire, l’ex-patronne de l’OFNAC a mis le premier président de la Cour suprême au cœur de la polémique.

Dans sa très médiatisée lettre adressée au président Macky Sall, quelques jours avant son limogeage, Nafi Ngom Keïta, la désormais ex-patronne de l’OFNAC, écrivait ceci : «Je m’abstiendrais de saisir la Cour suprême (pour contester son limogeage) pour excès de pouvoir, car son premier président (Mamadou Badio Camara) qui est censé recevoir mon recours, est en désaccord avec l’OFNAC, parce qu’il s’abstient de faire sa déclaration de patrimoine, comme du reste vos ministres conseillers. Quand je vous ai rendu compte, vous m’avez demandé de le laisser tranquille, alors qu’il est assujetti à la déclaration de patrimoine (…)».

Il n’en fallait pas plus pour précipiter le premier président de la plus haute juridiction du pays au cœur de la polémique. Face donc à cette situation qui empirait depuis ces révélations, le ministre sénégalais de la Justice, Me Sidiki Kaba, a fait une sortie, hier, pour dire que M. Camara «n’est pas assujetti» à l’obligation de déclaration de patrimoine.

D’après le garde des sceaux sénégalais, les crédits alloués à la Cour suprême au titre de l'exercice 2016 n’atteignent pas ce seuil d’1 milliard de FCFA fixé par la loi, puisqu’ils étaient «à peine» supérieur à 800 millions de FCFA. D’après la loi, «sont assujettis à la déclaration de patrimoine les administrateurs de crédits, les ordonnateurs de recettes et de dépenses et les comptables publics dont le niveau d’opérations porte sur un total annuel supérieur ou égal à un milliard de FCFA».

Pour Me Sidiki Kaba, le montant de 1,4 milliard de FCFA pris en compte par l’ex-présidente de l’OFNAC, représente «des dépenses de personnel» inscrites au titre 2 du budget général de la Cour suprême et «exclusivement» gérées par la direction de la Solde, des pensions et des rentes viagères du ministère de l’Economie, des finances et du plan.

Une explication loin d’être convaincante aux yeux de Birahime Seck du Forum civil. Ce membre de la société civile persiste et signe que «le premier président de la Cour suprême est bel et bien assujetti à la déclaration de patrimoine». Selon Birahime Seck, l’obligation de déclaration de patrimoine du premier président de la Cour suprême «ne peut concerner uniquement la gestion 2016».

Il rappelle que Mamadou Badio Camara a été nommé président de la Cour suprême le 27 mars 2015. Et, à ce moment, le budget de fonctionnement (excluant le budget d’investissement) de la haute juridiction s’élevait à 1,67 milliard de FCFA.

La polémique est loin d’être éteinte. C’est sans doute, inquiètes de l’ampleur inédite qu’est en train de prendre cette «affaire Nafi Ngom Keïta», que les puissantes confréries mouride et tidjane ont décidé de s’impliquer pour éteindre l’incendie.

Par Ibrahima Diallo (Dakar, correspondance)
Le 05/08/2016 à 13h57, mis à jour le 05/08/2016 à 14h12