Silence radio à Alger depuis la publication, ce mardi, du rapport Doing Business (DB) 2018. Alors qu’il y a une quinzaine de jours, Abdelkader Messahel, ministre des Affaires étrangères algérien parlait de cette Bible des affaires mondiales pour vanter la réussite algérienne et fustiger le Maroc et la Libye et la Tunisie, aujourd’hui, on ne fait aucun commentaire du côté algérien. Et pour cause, loin des déclarations de Messahel, le DB 2018 place l'Algérie à la 166e position mondiale sur 190 Etats, le Maroc à la 69e place mondiale ou 3e africaine et la Tunisie à la 88e position ou 8e africaine.
Revoir les déclarations de Messahel sur la prétendue première place algérienne selon le Doing Business:
Ironie du sort, l’Algérie n'a même pas pu garder sa 156e position qui était déjà peu enviable. Faute de réformes suffisantes, elle chute encore de 10 places, ne devançant plus que 24 pays dans le monde. À ce rythme, elle ne tardera pas à être rattrapée par les derniers de la classe.
Le fait est que le rapport 2018 consacre le Maroc à la première place en Afrique du Nord, juste devant la Tunisie.
Loin derrière, le pays de Messahel est en retard sur tout. Aucune réforme significative n'y a été engagée au cours des dernières années pour améliorer le climat des affaires, rendant les investissements extrêmement risqués.
A titre d'illustration, dans le domaine du crédit, le pays se classe 177e sur 190 pays dans le monde. Le secteur financier est dans un état catastrophique, l'absence de crédit bureau n'offrant aucune visibilité sur le surendettement des entreprises et des particuliers, pas plus que sur les mauvais payeurs.
Concernant le système d'imposition, avec 65% des revenus privés accaparés par le Trésor, la pression est insupportable.
En Algérie, il faut 630 jours en moyenne pour régler le moindre conflit commercial, contre 510 jours au Maroc et 565 jours en Tunisie.
Dans le domaine du commerce international, toute opération d'importation ou d'exportation se transforme en véritable parcours du combattant en Algérie, en raison des restrictions de toutes sortes, des coûts et des délais. Par exemple, un navire passe en moyenne 327 heures au port d'Alger contre 106 heures seulement au port de Casablanca et 80 heures à Tunis.
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L’Algérie n'autorise donc aucune comparaison avec les pays du haut du tableau africain, notamment le Maroc (3e) ou la Tunisie (8e) qui font partie du top 10. L'Algérie boxe principalement dans la catégorie des États en guerre et des pays instables ou de ceux qui font face à une pauvreté extrême comme l'Irak (168e), la Guinée-Bissau (176e), le Sud-Soudan (187e), la République démocratique du Congo (179e), la Somalie (190e) et dernière du classement.
On est donc très loin du rêve de Messahel qui se fendait d’une déclaration élogieuse sur l’Algérie: "On a un potentiel, on a de l'avenir. Nous sommes un pays stable, nous sommes un pays sûr. Ce n'est pas nous qui le disons, ce sont les autres qui le disent (…) Doing Business, aujourd'hui en Afrique du Nord, il n'y a que l'Algérie... Ni le Maroc, ni la Libye, ni la Tunisie."
Le DB 2018 démontre à suffisance que seule la première phrase de son propos doit être retenue: "On n'est pas le Maroc, on est l'Algérie". En effet, le Maroc, qui se classe 3e en Afrique en matière de climat des affaires, est bien éloigné d'un pays talonné par la Somalie ou le Sud-Soudan.