Algérie. le gouvernement peut mentir sur la paupérisation, les porte-monnaies non

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Le 06/03/2018 à 19h01, mis à jour le 06/03/2018 à 19h03

Baisse des revenus, forte hausse des prix... Les Algériens s'en sortent de plus en plus difficilement. La crise économique est bien là et se vit au quotidien. Reportage.

Dans un long reportage que leur consacre l'hebdomadaire Jeune Afrique, les ménages algériens affirment tous ne plus pouvoir s'en sortir. Le magazine français a suivi la famille Kaddour, composée de sept adultes et de quelques enfants, et ses quatre générations. Elle vit sur les collines de Aïn Benian, dans l'extrême Ouest de la capitale, dans une maison à étages qu'elle a du mal à finir de construire à cause de la crise. 

Le grand-père tenait un bureau de tabac, mais il a fermé en 2015, "à cause de la concurrence", précise-t-il. Du coup, c'est l'aîné de la famille qui a pris le relais avec sa quinquaillerie. Seulement tout n'est pas rose pour lui non plus. En 2017, son chiffre d'affaires a baissé de 60% par rapport à 2013. "En temps de crise, c'est le bâtiment qui souffre le premier", reconnaît Mohamed qui vit à l'étage de la maison avec sa femme, ses enfants et son frère. Les murs non peints de la maison et les travaux commencés sans jamais être finis corroborent ce qu'il vient de dire. 

Et, il suffit de faire un tour dans le quartier pour se rendre compte de l'état de la crise que vit le pays. Sur un petit périmètre, six boutiques ont déjà mis la clé sous la porte, "dont une station de lavage automobile, une quincaillerie et des supérettes", précise l'hebdomadaire. Avant de subir le même sort, Mohamed voudrait bien trouver un emploi de salarié, plus stable. Mais où en dénicher un quand tout un pays sombre dans la paupérisation? 

C'est là que l'on découvre que les chiffres officiels faisant état d'une inflation autour de 5% ne sont que pur mensonge. D'ailleurs, l'appréciation faite par l'Office national des statistiques concernant le niveau de vie en dit beaucoup plus sur le simple taux d'inflation. 

"Si une famille de la taille de celle des Kaddour – sept adultes – dépensait en moyenne 68.775 dinars par mois (soit 489 euros) en 2011, d’après la dernière enquête de l’Office national des statistiques (ONS) sur la consommation des ménages algériens, aujourd’hui, un budget mensuel de 110.000 dinars (environ 783 euros) couvre à peine leurs besoins, selon leur calcul", rapporte Jeune Afrique. Un bref calcul permet de savoir qu'une telle baisse de pouvoir d'achat correspon à une inflation de l'ordre de 8,5% par an pendant six ans ou un culmul de 60% d'augmentation des prix. Or, depuis trois ans, les salaires ont été gelé. Le salaires minimum garanti qui est 18.000 dinar ou 128 euros n'a pas été revu à la hausse. 

Et si ces chiffres ne suffisaient pas d'autres viennent confirmer la situation intenable des ménages algériens. En effet, le salaire moyen n'est que de 39,900 dinars depuis 2016, contre 36104 en 2003. Pour la famille Kaddour, il faudrait trois salaires moyens ou 6 salaires minimum algériens pour pouvoir couvrir convenablement ses besoins. Or, c'est loi d'être le cas. Du coup, Célia, la petite soeur, est obligé de tenir un carnet pour pouvoir gérer son maigre salaire de commerciale. "je suis obligée d'emprunter auprès de mes amis ou collègue pour boucler les fins de mois", confie-t-elle. Alors que, Mohamed, quant à lui, n'a pas acheté de vêtement depuis 6 longues années. N'eut été son frère qui vit en France et qui lui en amène chaque fois qu'il vient en Algérie, il ne porterait que des habits qui date de 2012. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 06/03/2018 à 19h01, mis à jour le 06/03/2018 à 19h03