Algérie: le gouvernement met fin au fiasco de la fabrication des smartphones «Made in Algeria»

DR

Le 11/11/2019 à 14h49, mis à jour le 12/11/2019 à 16h11

Le «Made in Algeria» bat de l’aile. Après l’automobile dont la production est à l’arrêt et l’électroménager en grande difficulté, c’est autour du fiasco de montage de smartphones de connaître une fin malheureuse. L'avenir de cette industrie aurait été scellé par les autorités. Explications.

Après l’arrêt du secteur du montage de véhicules à cause de la décision du gouvernement d’imposer des quotas d’importation de kits automobiles, la faillite annoncée de l’industrie du montage électroménager à cause d’unités qui dépendent quasi-totalement des importations de kits sans aucune valeur ajoutée locale, le gouvernement algérien décidé, cette fois-ci, de sévir contre l’industrie des smartphones.

Le ministère de l’Industrie aurait pris la décision de porter un coup dur à l’activité du montage de smartphones en Algérie, à cause des résultats qui n’ont pas atteint les objectifs escomptés, en excluant le secteur du dispositif préférentiel d'importation de composants CKD/SKD et en imposant, en conséquence, des taxes à l'importation de ces composants.

Cette décision aurait été prise, selon divers médias dont Ennahar, après une évaluation du secteur, qui a démontré que celle-ci n’apporte aucune valeur ajoutée à l’économie algérienne, et continue à être une source non négligeable de sorties de devises, à cause des importations de la totalité des composants entrant dans la confection des smartphones sous forme de kits SKD (Semi knocked down) –soit des kits complets de pièces d’un produit non assemblés. Et de fait, le taux d’intégration de cette industrie, à l’instar de celle de l’électroménager, est proche du nul.

A cause de cette situation, la loi de Finances 2020 exclut du dispositif des avantages accordés aux unités de montage, les importations de kits (éléments préassemblés) destinés aux unités de montage de smartphones. 

En plus, le gouvernement rétablira dès le 1er janvier 2020 les importations de smartphones, en leur appliquant un droit de douane de 30%.

Ainsi, en combinant l'arrêt des avantages fiscaux sur les importations de kits et le retour des importations, le gouvernement signe, en quelque sorte, la fin de cette industrie. 

Cette décision radicale illustre le fiasco de la politique industrielle menée au cours de ces dernières années par les Premiers ministres Abdelmalek Sellal et Ahmed Ouyahia, aujourd’hui derrière les barreaux, en même temps que de nombreux oligarques, accusés de corruption, de clientélisme et de favoritisme.

A l'origine, ces politiques visaient deux objectifs louables: diversifier l’économie algérienne qui repose sur la rente pétrolière, en ce moment en début de déclin, mais aussi réduire la forte facture des importations, qui pèse sur les réseves en devises du pays.

Alors que les objectifs ainsi étalés avaient été justes et nobles, les politiques industrielles mises en places ont été plus qu’approximatives, que ce soit au niveau de l’industrie automobile, de l’électroménager que du montage de smartphones, le clientélisme, la corruption et le calcul court-termiste visant à réduire coûte que coûte la facture des importations, ont rapidement pris le dessus sur une véritable stratégie industrielle pour le pays. 

Et naturellement, le bilan est loin des résultats préalablement escomptés, aussi bien au niveau de la production, aujourd'hui qualitativement et quantitativement faible, que de la réduction de la facture des importations et de la création d’emplois et de valeur ajoutée.

Bien au contraire, cette politique a permis à certains oligarques proches du régime déchu de s’enrichir davantage, en bénéficiant de certains avantages fiscaux et douaniers, gracieusement offerts.

Cette politique a fait perdre à l’Algérie d’importantes recettes douanières, du fait des exonérations dont bénéficient ces importateurs de kits, et n’a pas permis de réduire la facture des importations de ces produits.

D’ailleurs, les importations des kits ont flambé et même dépassé ceux des importations des produits finis, comme c’est le cas dans le secteur automobile.

En plus, les produits des montages, de piètre qualité, coûtent également très cher, une fois mis sur le marché. Les véhicules montés en Algérie coûtent ainsi plus cher que ceux importés, alors qu'ils doivent s'acquitter, au passage, de droits de douane.

En clair, le «Made in Algeria», concernant aussi bien l’automobile, l’électroménager que les smartphones est une véritable arnaque organisée par certains hommes politiques, avec la complicité de certains oligarques, sur le dos des consommateurs et des contribuables algériens.

Il reste à savoir si le prochain gouvernement aura les coudées franches pour démanteler cette véritable mascarade, et mettre en place les bases de véritables écosystèmes industriels, à l’instar de ce que le Maroc a réussi à accomplir en l'espace de quelques années seulement, tant dans l’industrie automobile que dans celle de l'aéronautique. 

Par Karim Zeidane
Le 11/11/2019 à 14h49, mis à jour le 12/11/2019 à 16h11