A ce rythme, le ciel tombera sur la tête des Algériens, tant les mauvaises nouvelles s'enchaînent. En effet, le baril Saharan Blend, le nom du brut algérien, s'échange désormais à 11,72 dollars. A ce niveau de prix, non seulement, il est vendu à perte, mais il ne couvre même plus les charges variables qui permettent de maintenir rationnellement l'exploitation.
En effet, de l'aveu même de Mohamed Arkab, le ministre de l'Energie, "le coût moyen de production du brut algérien est de 14 dollars US/baril", un chiffre qu'il convient de relativiser et que plusieurs récentes analyses mettent en doute.
Dans une analyse publiée sur le site Algérie 1, Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international, expert comptable de l’Institut supérieur de gestion de Lille, expliquait que: "entre 15 et 20 dollars, nous serions au seuil de rentabilité (profit net zéro), et le problème des coûts de production pour l’Algérie doit être posé".
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D'après la revue Perspectives économiques, le Moyen-Orient, qui détient le coût de production le plus faible au monde, extrait son baril de pétrole à quelque 27 dollars.
C'est d'ailleurs ce qui explique que l'Arabie saoudite maintient sa production à des quantités relativement élevées afin que les prix restent plus ou moins bas, dans l'unique but de désavantager ses concurrents, notamment les Russes et les Américains.
C'est dire que les 14 dollars annoncés par le ministre algérien de l'Energie comme étant le coût moyen de production paraissent discutables. Il s'agit peut-être de ce que les pétroliers appellent le cash-cost, la part de charges variables dans le coût global de production, encore appelé coût de fermeture par les contrôleurs de gestion.
En effet, quand le prix de vente ne parvient même plus à couvrir les charges variables, alors il vaut mieux arrêter la production, afin de limiter la casse.
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Or c'est désormais le cas. En somme, le pétrole algérien avait déjà fait le deuil de ses coûts de structures, c'est-à-dire l'amortissement des machines, des investissements liés à la prospection et le forage, mais également à l'énorme masse salariale qu'il ne faut plus s'attendre à récupérer. Il faudra en plus oublier une partie des autres frais qu'engendre la production.
Ainsi, à chaque fois que le prix de vente s'éloigne à la baisse des 14 dollars, c'est autant qui est perdu sur le baril par l'Algérie.
Au moment de l'élaboration du budget, le gouvernement algérien ne s'attendait pas à une pareille catastrophe. En effet, le Saharan Blend s'est même échangé au-delà de 70 dollars dans la séance du 6 janvier 2020. Un prix, qui permettait effectivement de dégager une marge confortable.
Aujourd'hui, deux choses font que l'Algérie n'arrête pas totalement sa production. D'une part, il reste les champs pétroliers de Hassi Messaoud où le coût de production reste encore bas. D'autre part, les contrats pétroliers signés auparavant doivent coûte que coûte être honorés par l'Algérie, faute de lourdes sanctions. Par conséquent, le pays est obligé soit de produire à perte soit d'acheter du pétrole sur les marchés internationaux et de le livrer à ses clients.
Pour ce qui concerne Hassi Messaoud, le coût de production serait de 5 dollars, toujours d'après Mohamed Arkab dont il convient depuis quelque temps de relativiser les propos propagandistes sur la bonne santé de l'industrie pétrolière et des finances du pays. Or, dans ces champs pétrogaziers, l'Algérie produit en moyenne 360.000 barils/jour.
Donc, pour cette quantité quotidienne, un prix de 11,72 dollars permet encore de couvrir les charges variables, voire une bonne partie des coûts fixes. Evidemment, il s'agit d'une goutte d'eau dans la mer, puisque la production globale algérienne est de l'ordre de 1,1 million de barils/jour. C'est dire que même, en tournant à plein régime, Hassi Messaoud représente à peine le tiers de toute la production du pays.