Deux événements filmés et mettant en scène des retraités en Algérie ont récemment retenu l'attention des internautes et fait le tour des réseaux sociaux. Il y a d'abord eu l'acte intrépide de celui qu'on appelle aujourd'hui "Batman". Ce vieil homme, lassé d'attendre, n'a pas hésité à escalader les grilles de protection qui le séparaient de la porte du bureau d'Algérie Poste où il était censé retirer sa pension de retraite en cette veille de l'Aïd Al-Kébir.
Ensuite, on a vu un retraité être roué de coups par un policier devant le bureau de poste de Maghnia dans la wilaya de Tlemcen. Plusieurs autres personnes âgées ont observé la scène sans pouvoir rien faire. La justice a finalement décidé d'ouvrir une enquête après la vague d'indignation sur les réseaux sociaux.
Ces deux scènes, qui se sont passées à 370km l'une de l'autre, n'ont hélas rien d'ordinaire. En effet, Tiaret et Maghnia ne sont pas les seules villes dans lesquelles des centaines de personnes, des sexagénaires et des septuagénaires voire des octogénaires pour la plupart, s'agglutinent des heures durant devant les bureaux de poste pour tenter de récupérer leur pension de retraite.
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Officiellement, c'est à cause du nouveau coronavirus que l'accès aux bureaux de poste est limité. C'est ce qu'affirment les autorités algériennes. Dès le 15 juillet, le ministre des Télécommunications, Brahim Bouzar, dont dépendent les services des postes déclarait ainsi: "avec la conjoncture pandémique, les effectifs sont réduits, les déplacements aussi".
Une affirmation qui convainc peu de monde. Car pour beaucoup, le véritable problème réside dans un manque de trésorerie. C'est l'avis du président de l'Association algérienne de protection du consommateur et son environnement (APOCE), Dr Mustapha Zebdi, qui parle d'"incompréhension totale" et estime que l'origine de la "faille" se trouve dans la pénurie de liquidité.
Le directeur d'Algérie Poste qui avait senti venir le problème avait décidé mettre en place un système visant à étaler la date de virement des pensions sur plusieurs jours. Il pensait aussi éviter ainsi la présence massive des pensionnaires à la même date et aux mêmes endroits. Les retraités sélectionnés en fonction du dernier chiffre de leur numéro de compte chèques postal (CCP) étaient convoqués à des dates différentes et ce calendrier devait permettre d'effectuer 10% des virements seulement chaque jour.
Sauf que ce système permet simplement de gagner du temps et ne résout pas le problème de trésorerie de manière définitive.
Au 31 décembre 2018, la Caisse nationale de retraites (CNR) devait payer mensuellement à quelque 3.217.503 bénéficiaires leurs pensions et allocations. Un nombre qui a, sans doute, augmenté en 19 mois.