Algérie. Happy birthday Mister President

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Le 27/02/2017 à 15h29, mis à jour le 27/02/2017 à 16h18

Alors qu'Abdelaziz Bouteflika fête son 80e anniversaire jeudi prochain, la presse se demande s’il pourra souffler ses bougies. L'homme "invisible", en chaise roulante et atteint d’une bronchite aigüe, n'a ni la force de gouverner, ni même celle de faire le figurant. Une lutte de pouvoir s'annonce.

Kiosque Le360 Afrique. Même si le président algérien arrivait à souffler ses bougies, certaines resteraient probablement allumées. Pour que toutes séteignent, il faudra que le clan, l'armée et le parti s'y mettent. Ce sera juste à l’image du système permettant encore au régime de tenir. Les analyses des think-tanks et des médias internationaux se suivent et se ressemblent. 

C’est au tour du quotidien Les Echos de s’intéresser à celui qu'il qualifie d'homme "invisisible", dans un article paru aujourd’hui sur son site. Invisible, parce qu’il n’est apparu que deux fois en public depuis juillet 2015. Invisible, parce que ses concitoyens ferment leurs yeux face à l’affligeante réalité depuis qu'il a été foudroyé par un AVC en 2013. Invisible enfin parce que le clan des apparatchiks lui sert de cache-sexe, mais fait tout pour que le système tienne encore debout.

Expédier les affaires courantes

Les experts que font intervenir Les Echos ne sont pas tendres avec Bouteflika. Pour Kader Abderrahim, spécialiste de l'Algérie à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), "la réélection en 2014 d'un homme en fauteuil roulant, incapable de parler, est probablement sans équivalent au monde". Evidemment, tout est fait pour sauver les apparences et faire en sorte que le château de cartes ne s’écroule pas. 

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Ainsi, "l’appareil d'Etat", dont le rôle consiste à "expédier les affaires courantes", est toujours là, analyse encore Kader Abderrahim.

Puisqu’il s’agit d’un système de pratiques clientélistes, chacun s’arrange pour prendre sa part du gâteau, celui des 80 ans de Bouteflika, mais également celui de la rente pétrolière et du pouvoir. Il est clair que dans tout cela, "le président n'est plus en état de fixer les grandes orientations stratégiques", poursuit-il. Mais "personne n'ose prendre des décisions, les hauts fonctionnaires lèvent le stylo, tout est suspendu à sa succession", conclut l’expert de l’Iris.

Tout le monde avec sa part de gâteau

La bousculade attendue jeudi autour du gâteau d’anniversaire renvoie allégoriquement à celle de la lutte de pouvoir qui se déroule actuellement en coulisses, en attendant que l’homme invisible passe de vie à trépas. Le futur successeur sera-t-il issu du Clan, de l’Armée ou du vieux parti de l’indépendance, le FLN ? Le quotidien ne tranche pas. Mais si théoriquement Abdelkader Bensalah, président du Sénat, devrait être le premier à la succession en cas de disparition de Bouteflika, concrètement cela risque de se passer de manière différente.

On évoque le nom du chef de cabinet Ahmed Ouyahya, mais le général Ahmed Gaïd Salah, actuellement vice-ministre de la Défense, ne cache pas ses ambitions. Abdelmalek Sellal, Premier ministre de son état, voudrait bien que le pouvoir lui revienne. Alors que Ould Abbes chef du FLN, le parti-Etat, est en embuscade pour voler la vedette à tout ce beau monde. 

Une chose est sûre, quel que soit le successeur, le système actuel devrait se perpétuer pour que chacun continue à profiter de sa portion du gâteau. Les défis sociaux, économiques et financiers auxquels le pays fait face avec la réduction des revenus du gaz leur importent peu. Mais comme tout le monde s'en moque, il ne reste plus qu'à inviter en la faisant revenir d'outre-tombe, une autre invisible, Maryline Monroe pour fredonner son doux air : "Happy birthday Mister Président". 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 27/02/2017 à 15h29, mis à jour le 27/02/2017 à 16h18