Abdelmalek Sellal, Premier ministre algérien jusqu'en fin mai dernier, doit se demander ce qui lui arrive. Comment, lui qui avait pratiquement commencé des consultations après les législatives de mai pour former un nouveau gouvernement, s'est-il retrouvé dans le collimateur du clan Bouteflika? Aujourd'hui ni les réseaux de son fils Farès Sellal, ni les nombreux hommes d'affaires qui ont bénéficié de marché de gré à gré ne peuvent rien pour lui. Ils pourraient même être des boulets qui peuvent précipiter sa noyade politique.
Son successeur, Abdelmajid Tebboune, lui réserve la totale. Il a décidé d'envoyer ses sbires scruter les moindres décisions de son gouvernement, selon la feuille d'information Maghreb confidentiel. Cela va des marchés de travaux publics, accordés de manière directe, aux contrats d'aménagement des zones industrielles en passant par les juteuses licences d'importation. Les nouveaux ministres ont reçu instruction de ne rien laisser passer et en cas de besoin ils pourront même compter sur les services secrets.
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Nul ne sait où tout cela pourrait mener, mais tout ce raffut n'est certainement pas pour laisser Abdelmalek Sellal, ses anciens ministres et les nombreuses personnes ayant profité des largesses de l'Etat, couler des jours tranquilles. Le fait est qu'en Algérie, népotisme et corruption sont tellement banalisés qu'il est relativement facile de faire tomber ceux qui ne sont plus au pouvoir.
Parmi les premiers à faire les frais de cette traque figure le très influent Ali Haddad, l'homme à la tête du patronat, le Forum des chefs d'entreprise (FCE). Le groupe ETRHB Haddad a justement bénéficié de près de 4,85 milliards d'euros de marchés publics sans appel d'offres, selon le nouveau ministre des Transports, Abdelghani Zaalane. Du coup, Tebboune aurait décidé de bloquer le versement de 900 millions d'euros qui devaient servir d'avance pour démarrer les travaux de plusieurs de ses chantiers actuellement à l'arrêt.
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Ali Haddad n'ose pas rouspéter et, de toute manière, en vrai homme du sérail, il sait ce qu'il faut faire pour avoir de nouveau les faveurs de Tebboune et surtout de Said Bouteflika. Il n'est pas besoin d'être devin pour savoir qu'actuellement, avec un Abdelaziz Bouteflika qui n'est lucide que par intermittence, c'est son frère Saïd qui tient les rênes. Or, il voudrait que ceux qui ont des ambitions sur le fauteuil du rais lui prêtent allégeance et attendent qu'il donne son feu vert.
Concernant la cinquantaine de licences d'importation que veut revoir Tebboune, elles ont été attribuées au moment où Bakhti Belaïd, alors ministre du Commerce, était sur son lit de mort à Paris. Tebboune, pour avoir assuré son intérim après son décès, sait bien par quel bout le prendre. Le dossier est désormais entre les mains d'un autre homme du clan, Ahmed Abdelhafid Saci, ex-wali de Tlemcen, bastion politique de Bouteflika.
Au niveau du ministère de l'Industrie, les marchés d'aménagement des zones industrielles passés par Abdessalam Bouchouareb sont également audités. Ces marchés avaient été bloqués bien avant la nomination de ce gouvernement, en partie pour casser les ailes d'un Bouchouareb un peu trop ambitieux.
Tout ceci pourrait bien mener les ex-membres du gouvernement devant la justice. Puisque Tebboune est secondé dans sa tâche par la Coordination des services de sécurité (CSS), c'est-à-dire l'ex-Direction du renseignement et de la sécurité (DRS). Il faut dire que les hommes de la CSS ont du métier en matière de traque de malversations. Même le clan présidentiel a subi leurs méthodes quand Ahmed Médiène alias Toufik était aux commandes et qu'il était secondé par Athmane Tartag dit Béchir, celui-là même qui est l'actuel patron des barbouzes.