Algérie: Exit le cinquième mandat, le clan Bouteflika fait une fixation sur une "continuité"

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Le 04/12/2018 à 10h49, mis à jour le 04/12/2018 à 11h21

Revue de presseAprès avoir parlé d'un cinquième mandat, les partisans de Bouteflika soutiennent désormais, en entretenant soigneusement le flou artistique, un concept de "continuité", comme si l'Etat algérien allait s'arrêter après le départ de l'homme au pouvoir depuis 1999... Ambiance.

Veulent-ils que Abdelaziz Bouteflika exerce ses fonctions de chef de l'Etat ad vitam aeternam? Ou alors l'entourage du président songe-t-il simplement à repousser à une date ultérieure l'élection présidentielle, pourtant prévue dans à peine six mois? Ce sont là les questions qui découlent d'une analyse pertinente des appels qui fusent de partout pour le maintien de Bouteflika au pouvoir, et que vient de publier le quotidien Le Soir d'Algérie dans sa livraison de ce mardi 4 décembre.

En effet, les cercles les plus proches du pouvoir appellent de plus en plus à une "continuité", explique Abla Chéri, l'auteur de l'article en question, qui s'inquiète de la signification cachée de ce terme. 

Tout a commencé avec une déclaration du secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), Djamel Ould Abbès, au demeurant écarté de son poste, en novembre dernier.

Ould Abbès, qui a appelé maintes fois à un cinquième mandat, a été le premier à demander aux journalistes de faire la différence entre "se porter candidat" et "continuer son action à la tête de l'Etat", explique Le Soir d'Algérie.

Dans un accès de lucidité qu'on ne lui a pas vraiment connu, Djamel Ould Abbès avait alors insisté sur la "nuance" à apporter entre une "candidature" et la "poursuite d'une mission". 

Cette sortie a marqué le début d'une nouvelle terminologie qui allait faire florès auprès de ceux qui ne veulent pas voir leurs privilèges remis en doute.

Après cette sortie de l'ex-secrétaire général du FLN, qui semblait agir en mission commando, deux autres partis de la coalition au pouvoir qui n'ont ensuite pas tardé à adopter le même discours - avec la même terminologie.

Le Rassemblement national démocratique (RND) et le Rassemblement de l'Espoir de l'Algérie (TAJ) ont ainsi subitement decouvert le concept de "continuité nécessaire à l'édification de l'Etat". 

Ensuite, une longue liste de soutiens de Bouteflika a repris le même discours, dans des termes qui n'ont que très peu varié. Quinze partis se retrouvant atour de l'Alliance nationale républicaine (ANR) se sont donc mis d'accord sur une nécessaire "continuité dans le cadre de la stabilité et des réformes". 

Même Abderrezak Mokri, secrétaire général du Mouvement de la Société pour la Paix (MSP - opposition) semble avoir abandonné l'idée d'un "consensus national" auquel il avait vainement appelé, pour épouser la thèse de la "continuité", mais à sa manière.

Mokri a en effet demandé le report de l'élection présidentiel pour au maximum une année, le temps de trouver un acccord. 

Cependant, une question reste en suspens. Quelle forme prendra donc cette "continuité", si elle doit avoir lieu?

Et si continuité il y a, ce sera réellement jusqu'à quand? Un an? Cinq ans?

Jusqu'à ce que Bouteflika, dans un ultime voyage, passe du palais d'El Mouradia (ou de sa résidence médialisée de Zeralda) au cimetière des martyrs d'El Alia?

Comme toujours, la nomenklatura cultive le silence. Mais en plus de toutes ces questionnements ô combien cruciaux, se pose un dernier, autrement plus important.

La République démocratique et populaire d'Algérie ne peut-elle donc vraiment pas survivre à l'ère Bouteflika, au point que les caciques du pouvoir aient fait de cette idée de "continuité" une obsession? 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 04/12/2018 à 10h49, mis à jour le 04/12/2018 à 11h21