Les étudiants et universitaires, puis enseignants et lycéens, ont déjà manifesté en nombre mardi et mercredi, à la suite des décisions du chef de l'Etat de renoncer à briguer un cinquième mandat tout en reportant sine die l'élection présidentielle initialement prévue le 18 avril.
Le dirigeant de 82 ans, à la santé précaire, a prolongé de fait son mandat actuel jusqu'à la fin d'une "Conférence nationale" chargée de réformer le pays et d'élaborer une nouvelle Constitution. Aucune date n'a été fixée pour cette conférence.
Les appels à un quatrième vendredi consécutif de grandes manifestations à travers le pays ont repris de plus belle jeudi en écho à la conférence de presse du nouveau Premier ministre Noureddine Bedoui, qui a remplacé lundi le très impopulaire Ahmed Ouyahia, et de son vice-Premier ministre Ramtane Lamamra.
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Leurs déclarations n'ont pas semblé apaiser la colère, vive depuis le 22 février, quoique toujours pacifique. Elle est d'une ampleur inédite depuis l'arrivée au pouvoir de Bouteflika il y a 20 ans, dans un pays qui n'a pas participé au printemps arabe de 2011.
"Nous avons entendu le message de la jeunesse algérienne" et "les revendications de la rue" fixeront le cap du futur gouvernement, a assuré M. Bedoui. Sa composition sera dévoilée "au plus tard la semaine prochaine" et il s'agira d'une équipe de "technocrates", puisant dans les "jeunes compétences, hommes et femmes", a-t-il précisé.
Préserver "la stabilité"
"La situation générale du pays est sensible et marquée parfois par des tensions ne permettant pas de parvenir à un consensus à même de répondre aux revendications" immédiatement, a argué M. Bedoui en ouvrant la conférence de presse.
"Il faut sortir de cette crise de manière calme et en veillant à la stabilité du pays", a-t-il poursuivi, en appelant à plusieurs reprises au "dialogue".
Bedoui, préfet de carrière jusqu'ici ministre de l'Intérieur, et qualifié par le quotidien El Watan il y a quelques mois de "ministre de la Répression", est souvent apparu à la peine pour répondre concrètement aux questions des journalistes.
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Il a justifié par la "volonté du peuple" le report de la présidentielle et l'extension par le chef de l'Etat de son mandat. Or ces décisions ont été jugées illégales voire inconstitutionnelles par de nombreux observateurs. Et il n'a pas donné de date pour la future présidentielle à l'issue de laquelle M. Bouteflika s'est engagé à se retirer.
Le nouveau Premier ministre a simplement indiqué que le mandat du gouvernement, qui n'aura qu'un rôle "de soutien et d'appui" de la Conférence nationale, "ne dépassera pas une année", laissant entendre que la Conférence elle-même pourrait avoir fini ses travaux en un an, ce dont doutent beaucoup.
Bedoui et Lamamra ont peiné à convaincre. "A quoi sert cette conférence de presse?", leur a demandé un journaliste: "Vos réponses ont jusqu'ici été hors sujet, vous ne donnez pas l'impression de vouloir répondre aux questions (...) du peuple".
"Profond décalage"
Mercredi, Lamamra, chargé de "vendre" le "plan de travail" présidentiel à l'étranger selon les observateurs, avait vanté les mérites des annonces du chef de l'Etat.
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Pour Bouteflika, "il ne s'agit pas de rester au pouvoir pendant quelques semaines ou quelques mois de plus", a assuré son ministre. "La priorité absolue est de réunir les Algériens et leur permettre d'aller ensemble vers un avenir meilleur".
Un autre ancien diplomate, Lakhdar Brahimi, réputé proche de Bouteflika, a défendu aussi les solutions proposées par le président. Il a prôné le "dialogue" et mis en garde contre tout "changement radical".
Mais, selon le quotidien Liberté, ces "interventions médiatiques ont eu le mérite de confirmer le profond décalage entre les solutions (...) proposées par le régime et celles défendues par le peuple".
Dans ce contexte, le derby d'Alger entre le Mouloudia et l'USM, avancé d'un jour pour ne pas coïncider avec les manifestations de vendredi, a été largement boycotté. Les supporters ont suivi un appel à ne pas assister à la rencontre en raison de craintes de violences qui pourraient mettre au pas la contestation.