Algérie: quand le Washington Post met en garde contre un scénario à l’égyptienne

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Le 14/03/2019 à 16h51, mis à jour le 14/03/2019 à 16h53

L’Algérie va-t-elle connaître un scénario identique à l’Egypte? Selon le Washington Post, la situation que traverse le régime algérien actuellement est similaire à celle de l’Egypte aux derniers jours de Moubarak. Le journal américain n’exclut pas le scénario égyptien et alerte les manifestants.

La situation que traverse le pouvoir algérien ressemble, à bien des égards, à celle du régime égyptien finissant de Hosni Moubarak lors de la révolution de 2011. Le raïs égyptien n’avait pas bien mesuré le degré de son impopularité et surtout de la volonté du peuple de voir un vrai changement, et non un colmatage pour rester au pouvoir et faire perdurer son régime. La suite, on la connaît. L’armée a fini par déposer le président pour éviter le chaos.

Est-ce le même scénario risque de se reproduire en Algérie? La réponse est affirmative, selon le Washington Post. Le journal américain estime que «les manifestations et la réaction du régime en Egypte en 2011 peut offrir quelques leçons aux Algériens».

En 2011, Moubarak, acculé, avait fini par reconnaitre la légitimité des revendications de la population, a nommé un vice-président et annoncé par la même occasion qu’il ne se représenterait pas lors de l’élection présidentielle suivante.

Et le message de Bouteflika aux Algériens renonçant à un 5e mandat et reportant les élections ressemble beaucoup au scénario égyptien.

En effet, face au mécontentement populaire, le pouvoir algérien essaye de contenir la colère de la population par le biais de concessions, dont le report de la présidentielle et surtout de la non candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un 5e mandat; et une transition dirigée par des barons du régime.

Seulement, à y voir de près, pour nombre d’Algériens, il s’agit surtout d’une ruse visant à perdurer le système en place en ce sens que le mandat de Bouteflika est prolongé sans limite avec «la tenue d’une conférence de transition vaguement définie».

Le Washington post explique ainsi que les manifestants algériens doivent éviter un certain nombre d’erreurs. D’abord, ils doivent insister «sur des réformes réelles et en refusant d’être apaisés par le retrait de personnalités du régime». En clair, les manifestants ne doivent pas se contenter de la non-candidature de Bouteflika, du départ d’Ahmed Ouyahia et du sacrifice de quelques barrons du régime.

Pour le journal américain, «en annulant la prochaine élection, l’octogénaire Bouteflika a dans les faits prolongé son mandat présidentiel pour une durée indéterminée, permettant ainsi au pouvoir «de mettre en place une transition favorable, ne menaçant pas ses intérêts». Le parallélisme est ainsi fait entre la nomination du ministre de l’Intérieur Noureddine Bedoui au poste de Premier ministre et celui d’Ahmed Shafik par Moubarak durant les manifestations de 2011.

Ensuite, les manifestants doivent maintenir la pression «en ne quittant pas les rues avant que leurs demandes soient satisfaites». Pour rappel, en Egypte, après la démission de Moubarak, qui a perdu le soutien de l’armée, les manifestants avaient abandonné la rue, plus particulièrement la place Tahrir laissant le pouvoir à l’armée. Si celle-ci a fini par céder le pouvoir aux civils, on connaît la suite. Les militaires sont rapidement revenus au pouvoir du fait que la transition n’était pas bien préparée.

Aujourd’hui, le régime actuel égyptien ressemble beaucoup à celui de Moubarak. «Le régime du président Abdel Fatah al-Sissi s’est avéré très adaptable et il est souvent décrit à présent comme «pire que Moubarak». Il cherche à étendre son pouvoir par le biais d’amendements constitutionnels lui permettant de rester au pouvoir jusqu’en 2034», souligne le Washington Post.

Du coup, pour le journal américain, «les semaines à venir seront critiques pour voir si les Algériens seront capables d’aller de l’avant ou s’ils se contenteront d’une révolte avortée comme en Egypte».

On peut dire que pour le moment, les Algériens ne sont pas tombés dans ces erreurs. Dès le lendemain de l’annonce de Bouteflika, ils ont repris les manifestations contre un «4e mandat prolongé», «contre Bédoui» et pour le «départ immédiat du régime». L’opposition algérienne a aussi rejeté les propositions du gouvernement.

Par Karim Zeidane
Le 14/03/2019 à 16h51, mis à jour le 14/03/2019 à 16h53