Mali: ce ventre mou qui menace la stabilité de toute l'Afrique de l'Ouest

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Le 25/03/2019 à 16h08, mis à jour le 25/03/2019 à 16h10

Violences terroristes, massacres à caractère ethnique et spirale sans fin de représailles, le Mali, un nom épique dans l’histoire africaine, renvoie désormais la triste image d’un Etat devenu le ventre mou du Sahel. Une situation qui menace la stabilité et la sécurité de ses voisins.

Le Mali vit actuellement un contexte de plus en plus dangereuse et une course démente vers l’abime confirmée par les derniers développements sécuritaires qui se déclinent et s’écrivent en lettres de feu et de sang.

Aux premières heures du samedi 23 mars, des hommes armés, présumés appartenir aux milices des chasseurs dogons et dozos, ont fait irruption dans deux (2) villages peuls, Ogassagou et Weligara. Ils y ont perpétré des massacres collectifs, avec un bilan total établi à 135 personnes tuées, selon différentes sources.

Les autorités de Bamako ont annoncé les premières sanctions avec le limogeage de plusieurs chefs militaires et des milices (ce qui interpelle sur leur rôle initial dans la création de ces groupes à l’origine de crimes répétés qui pourraient constituer un génocide au regard de la législation pénale internationale).

Le week-end précédent avait été marqué par une foudroyante attaque contre un camp de l’armée malienne dans la localité de Dioura (région de Mopti, centre du pays), un assaut qui a créé une véritable débandade des 200 défenseurs de la caserne, qui auraient ainsi abandonné un important arsenal face à une quarantaine d’assaillants, avec un lourd bilan de 23 militaires tués.

Depuis cette date, la colère gronde dans de nombreuses casernes. Les épouses et familles des militaires tués au front ont manifesté dans plusieurs villes (Nioro, Ségou, Kati...) pour dénoncer la gestion du conflit, «l’insouciance des autorités de Bamako et la mauvaise gouvernance».

Une ambiance qui rappelle étrangement la fin de règne de Amadou Toumani Touré (ATT) en mars 2012, comme si ce mois était maudit pour le Mali (Moussa Traoré a aussi été renversé par une révolte populaire puis militaire le 26 mars 1991).

Dans la région, la situation au Mali suscite une vive inquiétude. Ainsi, des voix s’élèvent pour interpeller Bamako et les leaders des pays voisins par rapport à leur responsabilité historique et leur devoir panafricain devant les graves crimes à répétition perpétrés au Mali.

Sur un ton indigné, le Pr Lô Gourmo Abdoul, vice-président de l’Union des forces de progrès (UFP-opposition) s’adresse au président Ibrahima Boubacar Keita (IBK) «qui avait été à la manifestation de soutien à Charlie Hebdo, en défilant dans les rues de Paris contre le terrorisme en France. Le monde attend ses larmes (même de crocodile) face à la tragédie de ses compatriotes peuls massacrés par des milices terroristes identitaires dans le pays qu’il gouverne. Le silence gardé par ses pairs du G5 Sahel spécialement, et par les autres voisins africains, est intolérable.

Quant au reste du monde

Réaction identique de Bah Woury, vice-président de l’Union des Forces démocratique de guinée (UFDG), qui relève «qu’avec la dégradation de la situation sécuritaire, le Mali est devenu le ventre mou de la région ouest-africaine, et une menace pour la stabilité des pays limitrophes. Les présidents Alpha Condé et Macky Sall doivent prendre des initiatives concertées dans le cadre de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)» en vue d’aider au retour de la paix dans ce pays voisin.

La main des groupuscules terroristes dans le fait identitaire, la très mauvaise réponse des autorités de Bamako, qui ont armé les milices et le problème de l’impunité persistante sont pointés du doigt par un rapport de la Fédération Internationale des Ligues des droits de l’homme (FIDH). Cette organisation va même jusqu'à engager la responsabilité pénale des éléments de l’armée malienne au sujet de sept cas de massacres collectifs.

Voilà les ingrédients qui détruisent l’Etat et installent le chaos sur les rives du fleuve Niger, en dehors de Bamako et quelques autres localités encore sous contrôle du gouvernement. Mais jusqu’à quand?

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 25/03/2019 à 16h08, mis à jour le 25/03/2019 à 16h10