Algérie: le régime joue à fond la carte de la répression

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Le 09/10/2019 à 10h12, mis à jour le 09/10/2019 à 10h14

Hier 8 octobre, les étudiants étaient sortis manifester pour le 33e mardi de suite depuis février, mais le régime algérien a décidé de mettre fin aux protestations en usant de la manière forte. Plusieurs étudiants ont été brutalisés. .

Désormais, Ahmed Gaïd Salah ne veut plus voir de manifestations pacifiques et entend mettre en oeuvre une stratégie du tout répressif. Ce sont les étudiants qui les premiers en ont fait l'amère expérience, avec eux les journalistes qui voulaient assurer la couverture de la manifestation ce mardi.

Les forces de l'ordre ont procédé à des centaines d'arrestations au centre d'Alger, selon les médias locaux.

Avant le milieu de la journée, selon Khaled Drareni, le représentant de Reporters sans frontière (RSF) en Algérie, il y avait déjà "une centaine d’interpellations au minimum au centre d’Alger, à square Port-Saïd, à la place des Martyrs et sur la rue Larbi Benmhidi". Et d'ajouter, au moment où il donnait l'information sur Twitter que: "la police tente toujours d’empêcher la marche des étudiants".

La police algérienne en voulait particulièrement aux journalistes qui sont régulièrement accusés par le régime de donner aux manifestations l'echos qu'elles méritent. Le nombre d'arrestations dans le rang des représentants de la presse laisse penser que des instructions ont été données spécialement pour les empêcher d'effectuer une couverture convenable de la manifestation de ce 33e mardi.

Ainsi, Hamza Aggoune, le correspodant de Russia Today en Algérie, ou encore Abed Charif, un journaliste de la presse locale, ont été brutalisés, conduits de commissariat en commissariat avant d'être libérés dans l'après-midi, quand la police a enfin réussi à casser le déroulement de la marche des étudiants.

"J'ai été interpellé peu après 11h rue Ben M'Hidi. Je prenais des photos de la marche", écrit Abed Charif sur Twitter. Il a ensuite été "transféré de commissariat en commissariat (Cavaignac, Amirouche, Hydra)", avant d'être "libéré peu après 16h". "Bilan: lunettes cassées, téléphone vidé de son contenu, sentiment d'inutilité, absurdité", conclut-il.

Evidemment, les acteurs politiques de l'opposition et la société civile condamnent cette nouvelle dérive d'un régime aux abois.

C'est le Front des forces socialistes (FFS), qui a été le premier à réagir à travers un communiqué. Il "condamne avec la plus grande vigueur les arrestations et mises en détentions arbitraires sans fin des animateurs du mouvement révolutionnaire pacifique qui ont pour finalité d’installer un climat de peur et de démobilisation".

Il s'agit, selon cette première formation de l'opposition créée dès 1963, d'une "véritable machination politique et médiatique qui se met en place pour le passage en force du scrutin présidentiel prévu le 12 décembre prochain rejeté par le peuple algérien".

Le Rassemblement Action jeunesse dont sept membres étaient en détention provisoire a également souligné que "le pouvoir à travers la matraque a essayé d’interdire la marche et de casser la détermination des étudiants, mais la volonté et l’engagement des étudiants étaient sans failles en brisant tous les obstacles dressés pour aller au bout de la violente répression".

Au niveau du Parti du Travail de Louisa Hanoune, on condamne une "répression sans précédent qui traduit une volonté du pouvoir de fait d’imposer par la force son agenda électoral, rejeté par l’immense majorité du peuple".

Enfin, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) "dénonce l’usage de la violence contre des manifestants pacifiques et exige la libération de toutes les personnes interpellées par les forces de répression".

En Algérie, beaucoup estiment que ce qui vient de se passer ce mardi pourrait se répéter le vendredi, faisant ainsi prendre au régime une pente glissante. les manifestations qui ont été pacifiques jusqu'ici pourraient ainsi se radicaliser.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 09/10/2019 à 10h12, mis à jour le 09/10/2019 à 10h14