Ahmed Gaïd Salah, le tout puissant chef d'état-major de l'armée algérienne, a osé l'impensable: envoyer la force publique pour mater les juges en grève depuis la semaine dernière. Il s'agit d'un "acte sans précédent dans le monde", s'indigne le Club des magistrats.
Des vidéos, qui circulent sur les réseaux sociaux, montrent un assaut inédit contre les magistrats. Au moins une centaine d'éléments des forces anti-émeutes ont investi le siège de la cour de justice d'Oran, deuxième plus grande ville du pays.
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Les juges et procureurs en grève entendaient s'opposer à l'ouverture de la session criminelle et l'installation des nouveaux magistrats affectés récemment par le ministère de la Justice dans le cadre du vaste mouvement concernant 3000 juges.
C'est d'ailleurs ce qui a provoqué la colère des magistrats.
Après ce coup de force, on se pose la question de savoir s'il est encore possible de concilier les positions en initiant un dialogue entre les autorités de tutelle et les magistrats grévistes, ce à quoi on a appelé, depuis le début, d'un côté comme de l'autre.
Il faut dire que la situation a commencé à s'envenimer quand dans la matinée d'hier, dimanche 3 novembre, un haut responsable du ministère tenait un discours très grave contre les magistrats, les estimant rebelles, donc logiquement à réprimer.
"Personnellement, je ne pense pas que nous sommes dans un cadre de grève. Nous sommes dans la rébellion. Nous sommes dans la désobéissance. C’est dommage que les magistrats, qui sont garants de la législation et du respect des lois de la République, agissent de la sorte. Nous sommes censés respecter la loi", a affirmé Abdelhafid Djarir, directeur général des affaires judiciaire et juridique au ministère sur les ondes de la Chaîne III.
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Actuellement, le dialogue n'est plus possible. Les magistrats se sentant humiliés sont en train de se radicaliser et continuent d'exiger le départ du ministre de tutelle Belkacem Zeghmati. Ils ont même appelé le Syndicat national des magistrats (SNM) à "une réaction d’escalade honorable".
Les réactions n'ont pas tardé. Pour le SNM, il s'agit d'un "précédent dangereux", d'une "atteinte grave à l'indépendance de la justice", alors que l'Union arabe des magistrats dénonce une tentative de "terroriser" les juges algériens.