Voilà quatre jours que la colère gronde dans les rues de Ouargla. Et voilà quatre longues journées que les contestataires se font gazer à la bombe lacrymogène et affrontent les balles d'une police anti-émeute qui perd son sang-froid. Depuis la proclamation des résultats provisoires des élections locales, on assiste à des scènes de guerre dans cette ville située à 775 km au sud d'Alger. La rue y est devenue incontrôlable, selon la presse algérienne. Cependant, durant le week-end des 25 et 26 novembre, les affrontements ont pris une nouvelle ampleur.
Trois personnes ont été arrêtées et un jeune homme est entre la vie et la mort. Il a été grièvement blessé à la tête et aux yeux par les balles en caoutchouc et les grenades lacrymogènes des CRS, qui ont visiblement reçu l'ordre d'étouffer la contestation avant qu'elle ne gagne d'autres villes. D'après le diagnostic initial qu'évoque la presse, la victime devrait perdre la vue. Elle sera évacuée au Centre hospitalier universitaire d'Oran dès lundi. La localité de Ouargla ne disposant malheureusement pas de structure sanitaire équipée pour assurer sa prise en charge. En réalité, la région est manifestement oubliée par l'administration centrale qui n'y investit que très peu les revenus du pétrole.
C'est l'une des raisons qui font qu'à Ouargla, la population, touchée par le chômage et exaspérée par les magouilles électorales, n'hésite jamais à sortir dans la rue, comme ce fut le cas lors des violentes émeutes de 2014.
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Cette fois, le pouvoir central veut placer le candidat du Front de libération nationale à la tête de la ville, au détriment du maire sortant qui appartient au Parti national pour la solidarité et le developpement (PNSD), une petite formation politique représentée par deux députés à l'Assemblée nationale, mais qui a une solide base à Ouargla.
Tout semble montrer des fraudes électorales au profit des candidats de la coalition au pouvoir, d'après le récit qu'en fait le quotidien ElWatan. "Il est à rappeler que contrairement aux 20 autres communes de la wilaya de Ouargla, les résultats de l’Assemblée populaire communale de Ouargla, contestés par le PNSD, n’ont été rendus publics qu’à 5h du matin", affirme ElWatan.
Pourtant "à 2h, des rapprochements de PV de centres donnaient le PNSD gagnant suivi de Fajr Jadid et HMS", ajoute le quotidien. Cependant, "le PV de synthèse rendu public le lendemain affichait le FLN en premier avec 11972, le PNSD avec 6921 voix, Fajr Jadid avec 3685, HMS 2961, le RND avec 2846", conclut le journal.
Le PNSD, qui s'estime lésé, a officiellement introduit une demande en annulation des résultats auprès du tribunal administratif dimanche 26 novembre.
Quoi qu'il en soit, la rue ne décolère pas malgré la répression. Samedi, durant toute la journée, les principaux boulevards et rues de Ouargla étaient fermés à la circulation et jusqu'en début de soirée, on pouvait entendre retentir les coups de feu.
Les témoins affirment que les autorités administratives locales, qui obéissent au gouvernement du FLN et à son allié RND, ont refusé de les recevoir, alors que durant les trois jours d'émeutes, ils n'ont eu de cesse de formuler des demandes d'audience.